Cliquez ici >>> đŸȘ„ camera sportive edition 14 by matuidi avis

Ă©ditiondu 28 novembre). L'occasion sera. donc, pour ficeler les derniers dĂ©tails et . faire le bilan des actions prĂ©cĂ©dentes pour. dĂ©finir une feuille de route avec laquelle le. Front mĂš-nera son combat. La contestation de rue a dĂ©jĂ  repris, comme l'atteste cette sĂ©rie de marches suivies. de sit-in devant les siĂšges des wilayas. A. l'issue de la rĂ©union du 10 dĂ©cembre AprĂšs sans Di Maria, Matuidi, et Zlatan (et Ă  une moindre mesure Silva et Aurier, parce que bon, Marquinhos et Van der Wiel ont fait le taf), c'est clairement pas le mĂȘme PSG. On a bien vu la diffĂ©rence quand Di Maria et Lucas sont rentrĂ©s (pour signer le contre assassin dĂ©cisif :emo:). Lavezzi n'est que l'ombre de lui-mĂȘme, et Cavani c'est un peu le Beauvue parisien Eneffet, je suis constamment a la chasse aux Ă©ditions limitĂ©es. Une belle piĂšce. Florian D. 5. Avis Il se fait connaĂźtre sur la toile grĂące Ă  son freestyle « PSG (Matuidi charo) » avec +20 millions de vues suivant d'une sĂ©rie de vidĂ©os qui cumule Ă  ce jour plus de 50 millions de vues. Le Buzz rap hardore de l'annĂ©e 2015 rentre #1 des ventes digitales et top3 du classement Afterthe Merrill choose, the board grew to 19 administrators. 10 have still left seeing that April, also as well as Sloan, Ward and Countryman. 5 have joined, giving the board 14 members.5 financial institution transfer tricks for customers LaCoupe du monde de football en Russie Ă  travers notre envoyĂ© spĂ©cial sur place Davy Gounel, c'est l'expĂ©rience immersive, en vidĂ©os, que Site De Rencontre Belge Gratuit Non Payant. — — — En prĂ©ambule du rĂ©cit de mon aventure en 2018, voici ci-dessous le film de ma diagonale des fous 2019, en camĂ©ra embarquĂ©e !Lien — — — — — — — —9 Avril 2017. Je termine difficilement mon premier marathon de Paris et forcĂ©ment, me jure que “plus jamais”. Pourtant 558 jours plus tard, je me retrouve Ă  l’autre bout du monde au dĂ©part de la course la plus dure du monde la Diagonale des fous. 168 km, 10 000 mĂštres de dĂ©nivelĂ© positif et vais tenter de vous raconter l’aventure que j’ai vĂ©cue avant, pendant et aprĂšs la course, mais je ne peux pas garantir une retranscription immersive. Il n’existe malheureusement pas de mots pour dĂ©crire les maux que l’on peut ressentir pendant plus de 2 jours, les Ă©motions qui nous traversent lorsque l’on met son corps et sa tĂȘte Ă  si rude Ă©preuve, et lorsque l’on va jusqu’au l’écris avant tout pour moi, pour garder une trace indĂ©lĂ©bile de quelque chose qui est trop gros pour ĂȘtre intĂ©gralement digĂ©rĂ© par le cerveau, mais aussi pour ceux qui m’ont suivi, ceux qui s’y intĂ©ressent, ceux qui voudront se lancer dans quelque chose d’aussi 14 Octobre 2018, J-4 avant la courseCe matin, c’est le dernier jour d’une prĂ©paration de presque 1 an. Je profite du week-end chez mes parents pour faire un dernier 10 km avec mon pĂšre dans les bois de l’Épau, au Mans. Je n’ai ni l’envie, ni les jambes, ni le coeur Ă  ça. Je suis Ă©puisĂ©. Toujours gĂȘnĂ© par ma jambe droite douloureuse au niveau psoas et du genou depuis 6 semaines. Mon corps et ma tĂȘte sont sur le fil du mon 143Ăšme jour d’entrainement depuis le 1er Janvier entrainements sur les 286 jours qui se sont Ă©coulĂ©s depuis le dĂ©but de l’annĂ©e. Soit 1 jour d’entrainement sur 2. Si l’on compte en plus les semaines de blessures subies au cours des derniers mois Ă©panchement de la gaine du tendon tibial postĂ©rieur, tendinite de la patte d’oie, dĂ©chirure du mollet droit, contractures, aileron rotulien, syndrome rotulien, les jours de rĂ©cupĂ©ration post course, les empĂȘchements, le travail, la famille... Le ratio augmente la diagonale des fous est un travail de tous les jours. On y consacre le temps libre pour s’entrainer et le temps oĂč l’on ne s’entraine pas pour y penser. Il faut ĂȘtre fou. Ou inconscient. Ou les se prĂ©pare Ă  affronter 168 km et 10 000 mĂštres de dĂ©nivelĂ© positif et nĂ©gatif, sans bĂąton, dans un climat humide, des variations de tempĂ©ratures allant de 0 Ă  35 degrĂ©s en quelques heures, des sentiers impraticables la plupart du temps, parsemĂ© de rochers, de pavĂ©s volcaniques, de pierres, de boue, de racines. On a l’impression que mĂȘme les conditions naturelles ont Ă©tĂ© programmĂ©es avec soin pour ajouter de la tracĂ© minutieusement dessinĂ© pour briser, physiquement et mentalement Ă  boucler en 66h maximum une prĂ©pare son corps et sa tĂȘte. S’entraĂźner rĂ©guliĂšrement, tout le temps, longtemps. Courir, pĂ©daler, nager, renforcer, gainer, muscler, Ă©tirer. Souffrir, se blesser, se soigner, se rééduquer. Sortir par temps froid, chaud, sec, humide, pluvieux, gelĂ©, enneigĂ©. Y aller quoi qu’il arrive, matins midis soirs et week-ends. Douter, beaucoup. On se pose des questions sans cesse, les mĂȘmes N’est-ce pas trop ambitieux ? Serai-je soignĂ© Ă  temps ? Si je me repose, je vais tout perdre ? Mais si je vais m’entraĂźner je risque de me blesser encore plus ?On fait attention Ă  ce que l’on mange. Vous buvez quoi ? Un Perrier tranche s’il vous plait. Ah tu bois pas d’alcool ? Si
 enfin non, pas maintenant. Un dessert ? Non se prĂ©pare Ă  souffrir pendant des heures, Ă  ne pas dormir pendant plusieurs jours. On prĂ©pare un Le Mans — Nantes Ă  pied avec plus de l’Everest Ă  monter et descendre en partant du niveau de la mer. Et qu’on se le dise, on sait trĂšs bien que la hauteur de l’Everest ne parle Ă  personne, si ce n’est Ă  quelques tĂ©mĂ©raires. 10 000 m de dĂ©nivelĂ©, c’est 10 km en hauteur. C’est la hauteur de vol d’un avion de ligne. C’est environ 275 fois les escaliers de Montmartre de haut en bas. C’est 33 Tour Eiffel empilĂ©es les unes sur les autres. À monter. Et surtout Ă  descendre. Avec 168 km en prĂ©pare au mieux le parcours qui nous attend, l’alimentation, l’hydratation, les ravitaillements, les pauses, essayer de prĂ©voir des minutes de sommeil, anticiper les bouchons potentiels, les barriĂšres horaires, l’assistance, les diffĂ©rents scĂ©narios possibles. Il faut essayer de penser Ă  tout, ne serait-ce que pour n’avoir Ă  se soucier, pendant la course, que de l’ prĂ©visionnel que j’ai prĂ©parĂ© km par kmEt enfin, on se prĂ©pare Ă  affronter les gens. Les proches qui nous soutiennent mais subissent et Ă  qui l’on impose tout ça. Les autres. Affronter les regards, subir les avis et jugements de chacun. Chacun en a un et il faut l’entendre. Les questions, pourquoi tu fais ça ? Pour 1000 raisons. “Je ne comprends pas”, je sais, tu ne peux pas. Il faut se tenir prĂȘt Ă  faire face Ă  l’isolement social qui se crĂ©er naturellement Ă  force d’entraĂźnement et de rigueur. À porter une Ă©tiquette, celle “du mec qui court”. S’attendre Ă  ĂȘtre dĂ©fini comme tel, au moins pour un temps, l’accepter. Devoir justifier pourquoi on doit s’entraĂźner plutĂŽt que de sortir ce soir. Vous essayerez d’expliquer pourquoi. Vous sortirez vos plus beaux discours cousus de fil blanc sur l’importance de se fixer des objectifs ambitieux dans la vie, sur les vertus du dĂ©passement de soi, de sortir de sa zone de confort, de se crĂ©er des histoires Ă  raconter pour plus tard. Vous essayerez mais rien n’y fera. Ce sera ? Car la marche psychologique est trop haute entre pratiquer un sport hebdomadaire et imaginer se lancer dans la course la plus difficile du monde, presque au dĂ©triment du on ne s’y lance pas au hasard. On dĂ©verrouille d’abord des barriĂšres mentales, petit Ă  petit. C’est comme tout. En Octobre 2015 quand j’ai commencĂ© Ă  courir, parcourir un semi marathon 21,1 km me semblait ĂȘtre une hĂ©rĂ©sie. Alors si on m’avait dit que 3 ans aprĂšs je serai prĂȘt Ă  affronter 168 km et 10 000 d+/d- 
Personne n’a commencĂ© les mathĂ©matiques par des primitives et des intĂ©grales. On apprend d’abord Ă  compter, Ă  additionner, Ă  soustraire, puis multiplier, diviser et ainsi de suite. On y va crescendo, on apprivoise les Ă©tapes. On se lance sur 1 km, puis 5 puis 10, puis 15, 20, 25, 42, 80. Et on se dit qu’on peut aller encore plus loin. On se renseigne, on regarde des vidĂ©os. “Lui il a l’air comme moi. S’il l’a fait c’est que je peux aussi, non ?” On parle avec des gens. On la Diagonale des fous c’est mettre pendant un temps, une partie de sa vie en 16 Octobre 2018, ParisCe soir je serai dans l’avion et dans 2 jours, sur la ligne de dĂ©part de la course la plus dure du monde, Ă  9500 km d’ passĂ© les 48 derniĂšres heures Ă  me reposer en essayant d’utiliser mes jambes le moins possible. J’en ai profitĂ© pour prĂ©parer une playlist de plus de 500 chansons. Ça fait environ 38h de lecture. Large !J’y ai ajoutĂ© toutes les chansons qui ont un temps soit peu marquĂ© ma vie, toutes celles que j’associe Ă  une pĂ©riode particuliĂšre. J’ai certainement dĂ» en oublier des dizaines mais j’ai l’impression de ne pas ĂȘtre trĂšs loin du compte. Tout ça en vrac. Ça donne des lectures alĂ©atoires avec des enchainements assez drĂŽles
 Jean-Jacques Goldman, Eagles, Nino Ferrer, Diam’s, Francis Cabrel, Hans Zimmer, Muse, 1 semaine, je m’alimente essentiellement de pĂątes, de pommes de terre et de riz. J’enchaĂźne les gourdes de Maltodextrine depuis 2 jours pour augmenter les rĂ©serves Ă©nergĂ©tiques de glycogĂšne. Je profite de ma derniĂšre journĂ©e Ă  Paris pour aller marcher un peu, faire une derniĂšre cryothĂ©rapie en immersion 4 minutes dans une salle Ă  -110°. J’en ai fait quelques unes dans l’annĂ©e, surtout pour accĂ©lĂ©rer la guĂ©rison des blessures musculaires et tendineuses. Je ne sais pas si c’est si efficace qu’ils le prĂ©tendent, mais on se sent super bien en sortant. Et sur Internet, ils disent que c’est hyper bon pour le corps. Effet placebo 2 valises sont prĂȘtes. L’une est pleine Ă  craquer, l’autre un peu moins. En tant que participant au Grand Raid de la RĂ©union, j’ai le droit Ă  2 x 20 kg Ă  l’aĂ©roport. La premiĂšre valise contient tout le matĂ©riel dont j’aurai besoin pour la course sac, bidons, 2 paires de chaussures, 2 frontales, une veste technique, des t-shirt techniques, des t-shirt seconde peau, 1 cuissard, 1 legging, 1 short de compression, 1 short, 6 paires de chaussettes, 1 porte dossard, Ă©co-cup, 2 x 2,5 mĂštres de bandages, de la crĂšme Nok, de la vaseline, des Compeed, des piles, des barres, compotes, des dolipranes
 C’est le seconde valise uniquement quelques short, t-shirt, caleçons, trousse de toilettes, maillot de bain. Le minimum. De toute façon si je suis Finisher, je ne lĂącherai pas le t-shirt “J’AI SURVÉCU” de la semaine qui suivra. Je me dis qu’aprĂšs tout ce qu’on va traverser, on mĂ©rite bien cette dose d’arrogance pendant quelques dois certainement ĂȘtre l’un des derniers Ă  prendre l’avion si tardivement par rapport Ă  la course. Je suis Ă  48h du dĂ©part et toujours Ă  Paris ce qui va me laisser trĂšs exactement 36 heures et 30 minutes une fois le pied posĂ© sur l’üle pour aller chercher mon dossard Ă  l’extrĂȘme opposĂ©, m’acclimater et me reposer suffisamment avant le dĂ©part. C’est trĂšs juste, mais je n’avais pas du tout rĂ©alisĂ© cela quand j’ai pris mes billets en FĂ©vrier. Tant pis, c’est trop tard pour se poser la faire les choses bien telles que l’on me les avait conseillĂ©es, il aurait fallu arriver 5–6 jours avant pour m’habituer Ă  la chaleur, pour aller repĂ©rer certaines parties du parcours et bien me reposer. Encore une fois, tant pis, je dĂ©couvrirai tout sur le tas, au moins il n’y aura pas de place pour l’apprĂ©hension sur la je suis Ă  l’aĂ©roport avec mes parents dans la salle d’embarquement. On s’amuse Ă  scruter les passagers Ă  la recherche de potentiels futurs fous... Il n’y a qu’à regarder la morphologie, les montres au poignet et la tenue. Je repĂšre une vingtaine de personnes avec des t-shirt Kalenji. Des familles. Parmi eux, les 3–4 pĂšres de familles ont l’air trĂšs affĂ»tĂ©s. Pour moi ça ne fait aucun doute, ils seront au dĂ©part. Le hasard fait que je me retrouverai en plein milieu de ce groupe de familles dans l’avion. Juste avant le dĂ©collage je m’adresse Ă  l’une des mĂšres, je lui demande s’ils partent pour le Grand Raid. Elle me rĂ©pond que pas du tout, qu’ils sont 5 familles Ă  partir ensemble et qu’ils ont louĂ© une villa pour 2 semaines ! Ils ne vont pas s’ennuyer
 L’un des pĂšres m’entend et ajoute qu’il n’oserait jamais se lancer lĂ  dedans. Et inĂ©vitablement, me retourne la question. Je rĂ©pond timidement que oui, j’y serai avec le dossard 104 et que je compte bien sur eux pour m’encourager. J’avais sous estimĂ© l’impact du dossard. Tous les regards se sont tournĂ©s vers moi en mĂȘme temps. Des regards d’admiration, de curiositĂ©, d’incomprĂ©hension, de “pourquoi tu fais ça ?”. Merde dans quoi je me suis lancĂ©, c’est si dur que cela ?La vĂ©ritĂ©, c’est que je suis inconscient. J’imagine bien ça va ĂȘtre dur, j’ai Ă©tudiĂ© le parcours km par km en fonction du dĂ©nivelĂ©, j’ai vu toutes les vidĂ©os de Youtube. Mais ça ne me fait juste pas assez peur pour ne pas y aller. HonnĂȘtement si j’avais pu, je me serai mĂȘme lancĂ© sur la Diagonale sans faire de trails auparavant, comme ça sans filet. Ce n’est Ă©videmment pas possible heureusement, il faut d’abord valider et terminer 2 courses ouvrant 85 points 1 km = 1 point / 100 m d+ = 1 point. Ce sont d’ailleurs les 2 seuls trails que j’ai effectuĂ©s dans ma vie L’Écotrail 80 km le 17 Mars 2018, le Festitrail 81 km le 29 Avril 2018. Et me voici en chemin pour le 3Ăšme, la Diagonale des sens que je m’attire dĂ©jĂ  les foudres de traileurs aguerris qui nourrissent le culte de l’effort progressif et des annĂ©es d’assimilation avant de se lancer sur une telle Ă©preuve. Je respecte Ă©videmment cette façon de faire qui est trĂšs certainement le droit chemin, mais je pense surtout qu’il n’existe pas de rĂšgle. Mes voisins sont un couple de retraitĂ©s adorable. Ils me souhaitent bonne chance et me disent qu’ils me suivront en direct sur Live Info. L’avion dĂ©colle Ă  20h, je m’empresse de manger mon plateau repas pour essayer de dormir au Octobre 2018, J-1, AĂ©roport de Roland Garros Saint DenisIl est 8h25 du matin quand nous atterrissons sur le tarmac de Roland Garros. La nuit a Ă©tĂ© saccadĂ©e mais j’ai pu dormir 5–6 heures au total, ce n’est pas si mal. MalgrĂ© tout je me sens trĂšs fatiguĂ©. Dans le tunnel qui permet de relier l’avion Ă  l’AĂ©roport, j’aperçois pour la premiĂšre fois les hauteurs de l’üle et les montagnes qui se dressent devant nous. TrĂšs honnĂȘtement, je ne m’attendais pas Ă  ce que ce soit aussi impressionnant visuellement. Les pentes et les cassures sont sĂšches et ça monte trĂšs trĂšs haut. C’est la premiĂšre fois que je me dis “ça y est c’est concret, tu ne vas pas faire la Diagonale des fous, tu y es maintenant”. Tes parents sont lĂ  pour toi, ta copine est lĂ  pour toi, son pĂšre aussi, tu ne peux plus merder. Non mais qu’est-ce que je me raconte ? Que je suis capable de rĂ©aliser un tel effort physique ? Tu n’as jamais marchĂ© en montagne de ta vie. C’est ridicule. Les premiers doutes apparaissent, je les chasse aussi prĂ©cisĂ© sur la plateforme du GR que j’arriverais par cet avion pour que l’on vienne m’accueillir mais Ă©videmment, tout le monde est Ă  Saint-Pierre pour la remise des dossards qui a lieu en ce moment mĂȘme. Bah oui Thibault
 Patrick, le papa de Laura est sur l’üle depuis 3 jours dĂ©jĂ , il nous attend avec la voiture ce qui est bien pratique. Ça nous Ă©vite de perdre plus de temps Ă  devoir louer une voiture Ă  l’arrivĂ©e. Nous montons dans la voiture, chargĂ©s comme des mules. Waze annonce 1h15 pour rejoindre Saint-Pierre. Il me faudra beaucoup plus demain soir pour relier les 2 points par le milieu de l’Île... Et surtout il n’y aura ni 4 voies, ni voiture. Mes 2 jambes et mes Salomon S/Lab Ă  Saint-Pierre; c’est jour de fĂȘte. C’est blin-dĂ©. Le village Grand Raid s’est installĂ© sur la place principale et il y a des milliers de personnes qui sont lĂ  Ă  la file indienne. Je traverse la place en longeant la longue file d’attente, en espĂ©rant y voir le bout mais rien n’y fait, elle s’étale sur des centaines de de y 2 files, celle pour rĂ©cupĂ©rer les dossards qui est quasi vide, et celle des goodies qui, il faut l’admettre, rencontre un franc m’empresse d’aller chercher mon dossard au stand. DĂ©sormais le 104 n’est plus un numĂ©ro qui traine dans un mail mais bel et bien un papier rĂ©sistant avec Ă©crit en gros “THIBAULT LOUÉ” au dessus du profil de course qui nous rappellera les courbes sinueuses du 2 dames qui me le remettent me dĂ©visagent sĂ»rement car je suis sans aucun doute l’un des plus jeunes concurrents, la moyenne d’ñge de la course Ă©tant de 44 ans. Elles me souhaitent bonne chance. Et oui, l’ñge d’or du trail c’est la quarantaine, pour la caisse et la tĂȘte paraĂźt-il. J’ai d’ailleurs vu dans le journal que le plus jeune Ă  se lancer a 20 ans Ăąge minimum et le plus ancien 72 ans. Respect Ă  eux rĂ©cupĂšre mes 3 sacs d’assistance dont je ne me servirai pas ayant le luxe d’ĂȘtre assistĂ© personnellement par ma famille. Et je file rĂ©cupĂ©rer l’équipement officiel, mon t-shirt Grand Raid et mon dĂ©bardeur obligatoire au dĂ©part Ă  l’arrivĂ©e. Ouf il reste ma taille
 Je me dis que mĂȘme si je vais pas au bout, le simple fait d’aller courir avec dans Paris aura de la gueule !Extrait de rejoins la file des goodies qui est trĂšs trĂšs longue. Il fait une chaleur accablante au soleil, je fais attention Ă  ne pas me dĂ©shydrater. Pendant l’attente, une bĂ©nĂ©vole vient Ă  ma hauteur et me parler d’une application pour les secours “Sara 112”. Elle m’explique le concept. En un clic, on se fait directement gĂ©olocaliser et on entre en contact avec les secours pour qu’ils puissent nous enseigner les premiers soins en cas de besoin, ou venir nous chercher. Je ne sais pas si c’est rassurant ou hyper flippant ? Quoi qu’il en soit je la tĂ©lĂ©charge et espĂšre ne pas avoir Ă  m’en servir. Au micro, le speaker annonce qu’il est Ă  cĂŽtĂ© d’une personne spĂ©ciale qui a participĂ© Ă  toutes les Ă©ditions du Grand Raid, soit 25 fois ! Wow. Le principal intĂ©ressĂ© le corrige immĂ©diatement. On entend au micro “non, j’ai terminĂ© 25 fois”. Un dĂ©tail qui vaut le coup d’ĂȘtre relevĂ© !Au bout d’une bonne heure d’attente j’arrive vers les stands des partenaires et en effet c’est la kermesse. On nous distribue un sac de course et on passe de stand en stand pour rĂ©cupĂ©rer des goodies plus ou moins utiles cache cou, Ă©co-cup, casquettes, savonnettes, gel douche, dentifrice etc. On repart avec un sac rempli de toute sorte de est 12h30, la distribution est terminĂ©e. Je rejoins mes parents et Patrick qui m’attendaient Ă  l’ombre et nous prenons la direction du port pour aller dĂ©jeuner. J’ai repĂ©rĂ© un petit restaurant qui sert des pĂątes un peu plus bas. C’est mon repas quotidien depuis 2 semaines, on ne change pas une Ă©quipe qui gagne. On s’installe terrasse du petit restaurant Ă  cĂŽtĂ© d’autre raideurs, et je sens que la fatigue de l’avion prend le dessus. Je n’ai qu’une hĂąte, que l’on puisse rĂ©cupĂ©rer la location Ă  Saint Leu pour dormir. Mon Ă©tat physique m’inquiĂšte sĂ©rieusement. Je commande un plat de spaghettis que j’avale aussi la fin du repas, Nathalie Mauclair et son mari passent juste devant nous. C’est une cliente Nathalie. Double championne du monde, double vainqueur au Grand Raid, gagnante de l’UTMB. Je la connais car elle est mancelle - comme moi - et est cliente lĂ  oĂč mon pĂšre travaille. On ne s’est jamais rencontrĂ© physiquement mais nous avons Ă©changĂ© par tĂ©lĂ©phone et par texto Ă  plusieurs reprises dans l’annĂ©e. Elle m’a donnĂ© de prĂ©cieux conseils pour prĂ©parer, apprĂ©hender la course et garder la tĂȘte froide. D’ailleurs Ă  souligner, quand mon pĂšre lui a dit que je me lançais sur l’épreuve, c’est elle qui m’a envoyĂ© un texto pour me dire que l’on pouvait s’appeler pour en parler. C’est dire le fossĂ© qu’il existe entre ce sport les autres. Vous imaginez MbappĂ© vous appeler pour vous montrer comment jouer au foot ?Je m’empresse d’aller la saluer. Elle a l’air en pleine forme, c’est elle la grande favorite de l’édition. Elle et son mari savent que je suis un jeune coureur dans tous les sens du terme et qu’il faudra ĂȘtre trĂšs costaud physiquement et dans la tĂȘte pour aller au bout. Ils en profitent pour me donner quelques derniers conseils, particuliĂšrement sur le dernier quart de la course. “Tout le monde dit qu’une fois sorti de Mafate au sommet du MaĂŻdo 115 km on va au bout. Mais non, il reste encore 50 km. C’est long 50 km quand on en a 115 dans les jambes.” Puis un second “Ah et quand tu seras sur le chemin des Anglais 145km Ă  155 km, n’essaie pas de suivre les rĂ©unionnais. Ils vont trĂšs vite car ils le connaissent par coeur. Certains essaient mĂȘme de battre des records sur les segments Strava
”. Pour information le chemin des Anglais c’est un chemin de pavĂ©s volcaniques trĂšs accidentĂ© qui monte et descend sans arrĂȘt. C’est un cauchemar, surtout en fin de chemin des AnglaisL’anecdote des segments strava me fait beaucoup rire, ça me rappelle 2–3 copains. Je lui souhaite bonne chance pour la course. Avec mes parents et Patrick, nous prenons la route vers Saint-Leu pour rĂ©cupĂ©rer la arrivant sur place, nous sommes en avance mais le propriĂ©taire des lieux se montre conciliant et nous accueille plus tĂŽt prĂ©vu pour que je puisse me reposer. En nous remettant les clĂ©s, il nous montre son “wall of fame” sur sa terrasse et nous explique que tous ceux qui ont signĂ© ont accompli quelque chose d’exceptionnel dans leur vie. Il me promet que si je vais au bout, je signerai sur son mur. Deal. L’endroit est sublime. On a une vue imprenable sur la mer depuis la terrasse et surtout des couchers de soleil de folie. Pendant le sĂ©jour, nous aurons mĂȘme le luxe de voir des a de la gueule en vraiJe file Ă  la douche et je me couche le temps d’une courte sieste. En me rĂ©veillant, je profite d’un dernier diner au bord de l’ocĂ©an Indien, en famille. Nous sommes Ă  24h du Octobre 2018, me rĂ©veille Ă  9h. Ce jour lĂ , j’en ai rĂȘvĂ© des dizaines de fois et j’y suis enfin. J’ai plutĂŽt bien dormi. Je pensais faire la course dans la nuit comme j’ai pu le faire de nombreuses fois au cours des derniĂšres semaines mais non. La fatigue accumulĂ©e a bien aidĂ©. Je me lĂšve et profite du soleil pour prendre un bon petit dĂ©jeuner hyper complet avec une derniĂšre bouteille de Malto au bord de l’ocĂ©an avec mes parents et Patrick. J’en profite, c’est le dernier avant quelques jours
9h30, je recharge toutes les batteries montre, tĂ©lĂ©phone, batterie externe. Je prĂ©pare mon sac de course avec mon pĂšre en veillant Ă  ne rien oublier du matĂ©riel obligatoire. On dĂ©roule la liste 2–3 fois pour ĂȘtre sĂ»r de ne rien lampe frontale avec piles ou batteries de rechange, OK1 couverture de survie d’une dimension minimum de 1,4m X 2m, OK1 rĂ©serve d’eau d’un minimum d’un 1,5 litre. OK1 sifflet, OK2 bandes Ă©lastiques adhĂ©sives permettant de faire un bandage ou un strapping d’une longueur minimum de 2,50 m, et de 6 à 8 cm de largeur. OK1 rĂ©serve alimentaire constante et suffisante pour relier les points de ravitaillement, OK1 vĂȘtement de pluie impermĂ©able avec capuche, et coutures thermo-soudĂ©es. OK1 vĂȘtement chaud type seconde peau » Ă  manche longues en tissus technique adaptĂ© Ă  l’environnement, OK1 gobelet par personne, OK1 piĂšce d’identitĂ©, OKOn prĂ©pare aussi le sac d’assistance qui contient tout ce dont je pourrais potentiellement avoir besoin sur les diffĂ©rents points rĂ©serves alimentaires, vĂȘtements secs, mĂ©dicaments, chaussures de rechange, piles pour la frontale. Est-ce que je prends la genouillĂšre ? Non allez fais toi se sent mieux quand le sac est fait. Il doit peser entre 3 et 4 kg. Ça vient compenser les 5 que j’ai perdus pendant la prĂ©paration !Je sens dĂ©jĂ  les montĂ©es d’adrĂ©naline dans mon corps Ă  chaque pensĂ©e pour la course. Je me mets dans le canapĂ© et note sur mon iPhone toutes les raisons pour lesquelles je suis ici. Je sais que je vais perdre toute ma luciditĂ© Ă  certains moments et que je ne serai peut ĂȘtre plus en mesure d’ĂȘtre rationnel. Et ça je devrai m’en je suis prĂȘt. Je n’ai plus qu’à attendre que le temps passe. Je vais m’allonger dans la chambre et lance un film pour me changer les idĂ©es. The Tourist avec Johnny Depp et Angelina Jolie, un bon film croisiĂšre pour ne penser Ă  rien. C’est le seul que j’ai sur mon iPad, ça me va trĂšs bien. Pendant ce temps lĂ , Patrick file chercher Laura Ă  l’aĂ©roport, elle doit atterrir aux alentours de Laura arrive et nous passons Ă  table. Je fais le plein de riz, pommes de terre, blanc de poulet, compote et fromage blanc. Puis je retourne m’allonger, l’attente est difficile. Je fais un point sur mon corps - Jambe gauche 90%- Jambe droite 75%- Fatigue 85%- Mental 200%15h, j’essaie de me rendormir mais sans succĂšs. Moi qui n’arrive jamais Ă  faire de sieste, j’en n’attendais pas moins en ce jour spĂ©cial. Les heures passent trĂšs lentement
 Je reçois beaucoup de messages de ma famille et de mes amis qui m’encouragent et me donnent de la force. Et parmi ces messages, il y a la causerie de Nicolas Allez mon pote, c’est l’évĂ©nement de ta vie, celui que tu n’oublieras jamais, celui que tu raconteras Ă  tes enfants, Ă  tes amis. Celui pour lequel tu as fait des tonnes de sacrifices alimentaires, sociaux, amoureux. Celui qui te permettra de fermer des bouches. Celui pour lequel tu as passĂ©s des heures — pour ne pas dire des jours — Ă  t’ pour ces moments lĂ  que tu aimes courir, pour le parfum de la ligue des champions, cette tension Ă©norme avant une grande course. AprĂšs celle-lĂ , rien ne sera jamais plus pareil. Pour toi personnellement, mais aussi dans le regard des gens. 2700 personnes sur 7 milliards d’habitants, tu vas rentrer dans un cercle ou mĂȘme pas 0,001% des humains pourront prĂ©tendre rivaliser avec ce mental, cette dĂ©termination, cette persĂ©vĂ©rance, cette rage de avant ça, avant la rĂ©compense ultime. Il y aura 168 km Ă  affronter, 10k montĂ©e mais aussi 10k de descentes, et donc 20k de haut et de bas. Pendant les bas, ces moments creux oĂč tu vas te dĂ©tester, te demander pourquoi t’es lĂ , ce moment ou le mental pessimiste va commencer Ă  prendre le dessus sur le physique. Je veux que tu chasses immĂ©diatement cette idĂ©e noire qui va rĂ©sonner dans ta tĂȘte. Je veux voir la rage de Lucas Hernandez, la combativitĂ© de Ngolo KantĂ©, la rĂ©sistance de Blaise Matuidi, la vaillance de RaphaĂ«l Varane. Je veux un chien enragĂ© qui va chercher son Ă©toile ! Car la 2Ăšme Ă©toile on l’a pas eu en buvant des pintes et en se la coulant douce en terrasse. Ce prestige que tu vas chercher, il se mĂ©rite. Pour le mĂ©riter il faut souffrir, et accepter de souffrir. Alors on ne baissera jamais les bras quoiqu’il arrive. Et quand on se sentiras au plus bas avec la tĂȘte baissĂ©e. On tape du pied au sol, on fronce les sourcils, et on repart !!!Pense Ă  tous ceux qui sont derriĂšre toi, tous ceux qui te soutiennent, depuis hier ou depuis le jour 1. Pense Ă  la fiertĂ© que tu vas nous donner. Regarde derriĂšre toi et vois tous les km que tu as fait pour te prĂ©senter sur cette ligne de dĂ©part. Ces kilomĂštres ils sont 10 fois supĂ©rieurs Ă  ce que tu t’apprĂȘtes a faire, le plus dur est donc derriĂšre. Il n’en reste que 168 pour atteindre le rĂȘve ultime. Tu ne vas pas jouer la coupe du monde la, tu vas jouer la Finale de la coupe du monde !!! Alors ON Y VA CHAUSSE LES SALOMON ET C’EST PARTI FRÉROTPense Ă  ce que diras GrĂ©goire Margotton quand tu franchiras la ligne d’arrivĂ©e. Ils s’appellent HUGO, BENJAMIN, RAPHAËL PRESNEL SAMUEL ANTOINE FLORIAN ADIL STEVE ALFONSE NGOLO BLAISE LUCAS PAUL KYLIAN OUSMANE CORENTIN NABIL OLIVIER DJIBRIL ET THIBAULT !!!!!ALLEZ MON POTE, rendez-vous dimanche midi pour le rĂ©cit Ă©pique. Je ne veux pas de messages avant ! Je veux aucune notifs de Thibault LouĂ© avant sa victoire. J’aurais aimĂ© ĂȘtre lĂ , j’ai tout fait pour venir mĂȘme Ă  la derniĂšre minute, mais je ne suis pas lĂ  juste physiquement. Parce que psychologiquement je suis lĂ  Ă  200%. Je te regarde, alors ne lĂąche jamais rien !Je veux ĂȘtre tout seul Ă  le faire l’annĂ©e prochaine !!! Ou alors tu seras avec moi pour battre ton record !LA FORCE. LA WIN OU RIENMerci Nicolas. Tel Aragorn, Neville Londubat, Elisabeth Swann, Didier Deschamps ou GrĂ©goire Margotton, tu as eu les mots message j’ai pu le relire Ă  un moment critique de la je dois partir dans 1 heure. Je prends une derniĂšre douche avant un long moment
 Je profite de chaque seconde de ce dernier moment de confort absolu. Puis un dernier repas similaire Ă  celui du midi. Rien de l’heure de s’habiller. Tout a Ă©tĂ© pensĂ©. Le choix du caleçon, la façon d’enfiler chaque vĂȘtement, trĂšs minutieusement. Je m’enduis le corps de vaseline pour Ă©viter toute friction des coutures avec la peau, sous les aisselles, sur les cuisses, derriĂšre les genoux. Sur un marathon c’est tolĂ©rable, sur un ultra ça peut trĂšs vite tourner au cauchemar. Je met de la crĂšme Nok sur les pieds, une belle couche et j’enfile mes chaussettes roses par dessus. Les manchons de compression aux mollets, le short de compressions pour les cuisses, le t-shirt officiel, le porte dossard, le sac, les gourdes, les chaussures que je ne serre pas, la casquette vissĂ©e sur la tĂȘte. La frontale est dans le sac, je la mettrai avant de partir. J’ai d’ailleurs trouver une super technique qui consiste Ă  la mettre dans le trou de la casquette. Je suis prĂȘt pour aller au Il fait dĂ©jĂ  nuit. Nous prenons le chemin de Saint-Pierre pour aller rejoindre le SAS de dĂ©part. Il y a du monde sur la route. C’est l’évĂšnement lĂ -bas ! Le dĂ©part est dans 4h
 Ça va ĂȘtre nous est demandĂ© d’arriver tĂŽt pour pouvoir contrĂŽler les sacs des 2659 raideurs et dĂ©poser les sacs d’assistance, ce qui j’imagine prendra Ă©normĂ©ment de Nous arrivons Ă  destination. Il y a beaucoup de monde et il est quasiment impossible de se garer. Je dis au revoir Ă  mon pĂšre & Patrick qui ont prĂ©vu d’aller garer la voiture plus loin et s’installer au 5Ăšme km pour avoir une chance de me voir passer. Le dĂ©part est noir de monde sur les premiers km, c’est difficile de trouver une pĂšre est trĂšs Ă©mu. Je n’ai pas l’habitude de le voir comme ça, mais je ne suis pas dĂ©stabilisĂ© comme j’aurais pu l’ĂȘtre de le voir ainsi Ă  un autre moment. J’entends la musique qui semble venir du SAS des coureurs oĂč des concerts sont donnĂ©s. Les raideurs sont tous vĂȘtus du t-shirt officiel jaune et blanc, beaucoup sont accompagnĂ©s de leur proche. C’est un peu ambiance quai de gare avant un dĂ©part Ă  la guerre
 Je reste quelques minutes devant l’entrĂ©e du parc coureur avec Laura et ma mĂšre sur un trottoir en attendant que ça se passe. À cĂŽtĂ© de nous il y a un couple d’une cinquantaine d’annĂ©e. La dame me dit que c’est son premier Grand Raid. Moi aussi ! Mais elle a dĂ©jĂ  fait l’UTMB il y a quelques annĂ©es
 Ah d’accord. Et toi ? Hein moi ? Euh. L’écotrail de Paris
 hihi, sourire je dis au revoir Ă  Maman et Laura avant d’entrer dans le parc des coureurs. C’est parti, je suis seul face Ă  moi mĂȘme jusqu’à demain matin Ă  Mare Ă  Boue 49 km, environ 10–11h de course oĂč j’aurai ma premiĂšre assistance. Passage obligatoire, je fais contrĂŽler mon sac par une bĂ©nĂ©vole. Elle vĂ©rifie que j’ai bien les 2 x 2,5m de bandages, la couverture de survie, le sifflet, les 1,5 L d’eau, la rĂ©serve alimentaire, la veste, la seconde peau, la batterie de frontale de rechange. SĂ©curitĂ© avant tout. Je passe le test avec succĂšs et je me dirige vers l’endroit oĂč attendent tous les coureurs. Une sorte de parking avec des gros cailloux au sol et de l’herbe par repĂšre un stand de ravitaillement Ă  l’autre bout. Je m’y dirige pour manger un morceau et boire quand tout Ă  coup
 VLAN. La cheville qui se plie sur un gros caillou. Je ne suis mĂȘme pas parti que j’ai failli me faire une entorse bĂȘtement, juste parce que je ne pensais Ă  rien et que je n’ai pas serrĂ© mes chaussures avant de partir. Cet avertissement me rappelle qu’il faudra ĂȘtre vigilant tout au long de la course. Qu’une course de 66h, c’est 3960 minutes, soit 237 600 secondes. Tout autant de risques de se blesser. J’insiste, la diagonale des fous, c’est un risque Ă  chaque je me dirige vers le ravitaillement d’avant course. Je choppe quelques morceaux de sucres sur les tables que je mets dans mon short et je vais m’allonger dans l’herbe. Le dĂ©part est dans 2h15. Il fait bon, peut ĂȘtre 25 degrĂ©s, trĂšs humide. Un petit vent assez frais se lĂšve, ce n’est pas dĂ©sagrĂ©able. D’oĂč nous sommes, nous voyons la montagne s’élever Ă  perte de vue vers les nuages. C’est Ă  cet endroit prĂ©cis que nous allons effectuer la premiĂšre ascension. Je la regarde d’un air inquiet. Il va falloir monter tout ça ? Et ce ne sera que le dĂ©but
 Je chasse rapidement ces pensĂ©es, m’allonge par terre et regarde le ciel en attendant que ça se passe. Je sens un peu de fatigue, mais plus le dĂ©part va approcher, plus mon corps va se charger en les minutes passent si lentement
 les coureurs s’accumulent dans le de suis trĂšs jeune par rapport Ă  tout ce monde. A vrai dire, j’ai cette sensation bizarre d’ĂȘtre comme un peu comme un imposteur ici, de ne pas mĂ©riter d’ĂȘtre lĂ . Un peu comme un Ă©tudiant Erasmus qui s’en va prendre l’avion, que l’on surclasse par hasard en business class et qui se retrouve en t-shirt H&M Ă  commander du champagne illimitĂ© parce que c’est gratuit. Non Thibault, tu as mĂ©ritĂ© d’ĂȘtre lĂ , tu as travaillĂ© dur, tu as effectuĂ© tes 2 courses qualificatives avec succĂšs. Je reste dans ma bulle, conscient de mes aptitudes mentales et dĂ©jĂ  la 3Ăšme fois que je vais dans les toilettes de chantier depuis que je suis arrivĂ©. Et ça ne va jamais en s’amĂ©liorant d’habitude
Avant mon premier marathon en Avril 2017, je me souviens devoir faire pipi toutes les 10 minutes pendant 1h30
 Prends sur toi beaucoup de mal Ă  tenir en place mais je dois absolument m’économiser. Je me dirige vers les tables posĂ©es Ă  cĂŽtĂ© du ravitaillement pour m’assoir. À cĂŽtĂ© de moi il y a un couple de retraitĂ©s, ils sont trĂšs sympathiques. Ils doivent avoir la soixantaine passĂ©e et en sont Ă  leur 4Ăšme participation. La dame me fait remarquer que je suis trĂšs jeune, et que “nous les jeunes, on veut tout faire vite, qu’il faut savoir Ă©couter son corps”. Je lui rĂ©pond que c’est ce que je fais, que mon corps hurle d’envie d’aller traverser cette diagonale. Pour ĂȘtre honnĂȘte, je sais que c’est bienveillant mais ça m’agace quand on me dit ça. Un peu comme quand on dit Ă  MbappĂ© “tu es jeune, tu gagneras le ballon d’or plus tard”. NON. C’est une brute, il a 19 ans, donnez-le-lui. Je m’égare
En face de moi il y a un homme d’une quarantaine d’annĂ©es. C’est sa 3Ăšme participation. Il a Ă©chouĂ© sur les 2 premiĂšres. Il habite sur l’üle depuis quelques annĂ©es et est un coureur expĂ©rimentĂ©. Il m’explique ses 2 Ă©checs, une hypothermie au Col des boeufs dans le cirque de Mafate 85 km aprĂšs une micro-sieste je prends note, et une pĂ©riostite l’annĂ©e d’aprĂšs dans le mur qui descend Ă  Cilaos63 km. Je lui explique que c’est ma premiĂšre diagonale et que je me sens prĂȘt, ridicule. En prononçant ces mots, j’ai l’impression de vouloir m’en convaincre. Oui, je n’ai jamais couru en montagne et j’habite Paris, mais ça va le faire non ? Nous nous souhaitons bonne chance et resterons ensemble jusqu’au dĂ©part. Je retiens son numĂ©ro de dossard, c’est le seul que je retiendrai d’ailleurs parmi tous ceux que j’ai croisĂ©s et Ă  qui j’ai pu dire “fais attention je regarderai si t’es Finisher Ă  la fin !” FĂ©licitations Mathieu Magrin 263, Finisher en 485933. Tu l’as il y a enfin un mouvement de foule. Ahhhh. Tout le monde se lĂšve et se dirige vers les barriĂšres, ce qui semble ĂȘtre le passage pour accĂ©der Ă  la ligne de dĂ©part. On dirait l’ouverture des grilles un jour de soldes. Nous sommes Ă  45 minutes du dĂ©part. Il va falloir rester debout jusqu’au bout maintenant. Merde, je n’ai pas pu faire mon dernier pipi de dĂ©part
 Je n’ai pas dit mon dernier mot; qui dit 3Ăšme trail dit “expĂ©rience”. Il fait nuit
 nous sommes entassĂ©s
 j’ai trĂšs envie d’aller aux toilettes, j’ai une bouteille d’eau presque vide dans la main
 Je vous laisse le soin d’imaginer la suite Ă  21h36 et 21h49. SystĂšme D, ça fait partie du sport. À ce stade c’est du gĂ©nie. Nous sommes entassĂ©s, chacun veut se placer au plus prĂšs de la ligne, car le dĂ©part de la course est dĂ©terminant. Petite parenthĂšse explicative du partir du 15Ăšme km, nous entrons dans des “single” petits chemins de forĂȘt dans lesquels il est trĂšs difficile, voire impossible de doubler. Avec le flux de coureurs trop important par rapport Ă  la capacitĂ© qu’ont ces chemins Ă  accueillir les coureurs, cela crĂ©er naturellement un bouchon. Il faut donc arriver avant que le bouchon ne soit trop consĂ©quent, au risque de perdre trop de temps et se faire Ă©liminer par les barriĂšres horaires. Bon, l’organisation a annoncĂ© qu’ils avaient revu cette portion et qu’ils avaient fait des amĂ©nagements pour les supprimer
 Mouais. De l’autre cĂŽtĂ©, il faut effectuer le bon dosage pour ne pas se cramer en partant trop vite. D’ailleurs, il y en a quelques uns qui partent trop vite et abandonnent dans les premiĂšres nous sommes entassĂ©s comme des bĂȘtes en attendant que ça se passe. Le speaker envoie l’hymne du Grand Raid, une musique Ă©pique que je n’arrive pas Ă  retrouver d’ailleurs. Il nous chauffe avec des phrases travaillĂ©es Ă  l’entraĂźnement. Tout s’enchaĂźne, c’est une symphonie. La technique de Neymar et l’élĂ©gance de Verratti au micro. “AU ÉCHEC, LE FOU SE DÉPLACE TOUJOURS EN DIAGONALE”. C’est un parolier ! ArrĂȘtez-le ! Ceci dit j’adore la mĂ©taphore. Il prĂ©sente les favoris, François D’HaĂšne, Benoit Girondel, Antoine Guillon, Maxime Cazajous, Nathalie Mauclair. Tous ces monstres de la discipline ne sont qu’à quelques mĂštres devant nous et auront la primeur d’ouvrir la course. En mĂȘme temps je ne me vois pas les suivre Ă  16 km/h
21h45, la ligne de bĂ©nĂ©vole mise en place pour nous retenir est bien lĂ , la musique de plus en plus forte. La tension est palpable, quand tout Ă  coup
 ON AVANCE. Ça y est le train est en marche, la masse de raideurs se bouscule, tout le monde s’accroche Ă  son voisin, au sac de celui qui est devant. On marche sur des bouteilles, des cailloux, c’est hyper dangereux. On avance comme des lĂ©gionnaires romains dans leur Scutum. Ça piĂ©tine. Plus que quelques quelques dizaines de mĂštres Ă  parcourir et nous serons bientĂŽt sous l’arche de dĂ©part. Je suis plutĂŽt bien placĂ© dans le SAS. De chaque cĂŽtĂ© de la route, c’est noir de monde. Il y a une ambiance de fou furieux, la musique est prenante. On nous acclame, ça applaudit, ça siffle, et les supporters sont Ă©talĂ©s sur les 5 premiers km. C’est inimaginable. Ça y est on est sur la ligne droite du boulevard, tel un avion prĂȘt Ă  and gentlemen We will be taking off shortly. Please make sure that your seat belt is securely fastened. C’est le moment de tout donner. Margotton aux commentaires, Thiago Motta au corner, Thiago Silva Ă  la rĂ©ception. Les frissons. Je sautille. Mais jambe douloureuse se fait sentir mais je l’oublie un temps. 21h55, 5 minutes. Je suis comme un fou. 21h56, je ferme les yeux, je veux me rappeler toute ma vie de ce moment. 21h57, putain ça va partir. Les rĂ©acteurs sont Ă  pleine puissance, quand je lĂącherai les freins ça va partir. 21h58, j’ai la chance d’ĂȘtre lĂ . 21h59, Pense Ă  tous les sacrifices que tu as fait, les amis, les soirĂ©es, l’alcool, la bouffe, les entrainements tard le soir, tĂŽt le matin, les
 merde pas le temps 5, 4, 3, 2, 1
SAINT PIERRE - Ravine Blanche - Km 0C’EST PARTI ! C’ foule sur le cĂŽtĂ© est en dĂ©lire, un feu d’artifice est tirĂ© ! Wow. Je pense que je ne verrai jamais un dĂ©part de course aussi fou. Ça piĂ©tine pendant quelques secondes et j’arrive finalement Ă  me lancer. Je pars sur un petit rythme bien maĂźtrisĂ©, entre 9 et 10 km/h. C’est une allure que je peux tenir pendant des heures sans bouger, ça me permet de rester dans ma zone de confort sans consommer d’énergie. Je n’excĂšde pas la vitesse prĂ©vue, j’arrive Ă  garder la tĂȘte froide malgrĂ© l’ambiance. Devant, c’est parti trĂšs trĂšs vite. Je slalome mais je me fais doubler par beaucoup de personnes. La clĂ© c’est de faire abstraction du flux de personne qui double. J’avais fait la bĂȘtise de suivre au Festitrail, j’avais payĂ© la note inĂ©vitablement. LĂ , je me laisse aller. Je pars pour au moins 50h de course, il faut gĂ©rer. Je me rapproche du bord de la route pour taper les mains des supporters et
 VLAN ! Un terre plein central que je n’avais pas vu, je me rattrape de justesse. 2Ăšme avertissement Ă  moins d’1 km du dĂ©part. Le cardio Ă  ma montre reste stable mais il fait trĂšs trĂšs lourd, il est un poil au dessus des constantes habituelles. On continue sur le boulevard en bordure de l’ocĂ©an pendant 3 km environ. L’ambiance est toujours aussi folle. Dans ma tĂȘte il se passe plein de choses. Un mĂ©lange de “CASSE LA DÉMARCHE COMME SAMUEL, SAMUEL UMTITI”, de “NE PARS PAS TROP VITE NE PARS PAS TROP VITE”, de “N’IMPORTE QUOI QU’EST-CE QUE TU FOUS LÀ MDR” et de “PUTAIN IL EST PLUS LONG QUE SUR LES VIDÉOS CE BOULEVARD”. Chaque main que je tape est une dosette d’énergie que j’essaie de visualiser et de stocker dans mon corps. Certains se prennent au jeu et courent avec nous sur quelques dizaines de mĂštres avant de nous souhaiter un ultime “bon courage”. Que c’est bon. Nous profitons de ces derniers instants de plat et de bĂ©ton et c’est rare de le souligner avant d’affronter les terribles sentiers qui nous attendent. 4Ăšme km, on commence Ă  monter dans les rues de Saint Pierre vers les hauteurs. Certains marchent dĂ©jĂ , je continue sur ma lancĂ©e jusqu’à ce que la pente soit trop raide pour que je sois dans une zone confortable. 5Ăšme km, j’entends “MON TITIIIIIIIIIII !” Ah ! Ça c’est maman ! Ma famille est lĂ  ! J’ai Ă  peine le temps de tendre ma main pour leur taper que je suis dĂ©jĂ  passĂ©. Ils ont Ă©crit mon numĂ©ro de dossard au les avais prĂ©venus. Au dĂ©part ça va trĂšs vite et je ne pourrai pas m’arrĂȘter. Les lumiĂšres de la ville s’estompent peu Ă  peu Ă  mesure que nous entrons dans les champs de cannes Ă  sucre. C’est parti pour 35 km de montĂ©e pour chauffer les n’y a plus aucune lumiĂšre et je maintiens mon rythme de 9-10 km/h sur le plat et marche rapide dans les cotes. Je me sens bien, mĂȘme si j’ai dĂ©jĂ  beaucoup transpirĂ© Ă  cause de l’humiditĂ©. Je rĂ©alise difficilement ce qui m’attend, j’ai toujours un peu de mal Ă  rentrer dans les courses. Nous sommes dĂ©sormais bordĂ©s par les champs cannes de chaque cĂŽtĂ©, ça monte doucement. La tĂȘte de course est dĂ©jĂ  trĂšs haute, on peut voir les frontales au loin dans la montagne. Ça donne une petite idĂ©e de ce qui PLAT - 7 KM 196m d+1er ravitaillement d’eau uniquement. Je n’ai quasiment pas bu dans mes gourdes depuis le dĂ©part et j’avais prĂ©vu de ne pas m’arrĂȘter Ă  cet endroit. Il s’agit simplement d’une tente dans un virage, je passe devant et je remonte des places. Je n’ai toujours pas allumĂ© ma frontale, je profite de la lumiĂšre qui Ă©mane de celle des autres largement suffisante pour le ravitaillement d’eau. Extrait de aprĂšs avoir passĂ© le ravitaillement, la difficultĂ© des montĂ©es monte d’un cran. On est sur du chemin de terre, un peu rocailleux avec des cannes Ă©crasĂ©es au sol. Et c’est raide. Je passe en marche rapide et je commence Ă  remonter quelques personnes qui avancent moins de haut d’une bosse je me retourne et je peux admirer un magnifique serpent de lumiĂšre derriĂšre moi. Cette image me rassure car nous voyons bien la ville de Saint-Pierre qui s’éloigne de plus en plus. Surtout, il reste encore pas mal de personnes derriĂšre moi, je me dis que je suis pas trop trop mal. Il y a des micro-moments de plat et de descente pendant l’ascension, j’en profite pour relancer et gratter quelques places dĂšs que je peux. Dans la montĂ©e, des petits groupes se forment rapidement. Je repĂšre une fille qui semble avoir le mĂȘme rythme que moi, nous nous suivrons en silence pendant 2–3 km, puis je la dĂ©passerai par la suite. C’est assez drĂŽle avec du recul. Il y a toujours des personnes avec lesquelles on passe une toute petite partie de la course, sans jamais dĂ©crocher un mot, mais juste en sachant qu’il ou elle est un binĂŽme pendant quelques plutĂŽt bien dans une pente rĂ©guliĂšre, les cailloux et les trous sont prĂ©sents mais pas non plus omniprĂ©sents, on peut encore les Ă©viter. Le sol est trĂšs poussiĂ©reux en revanche et le flux de coureurs la fait voler. Je peux la voir dans la lumiĂšre de mon frontale. J’imagine que l’on en respire une belle dose
 Il commence Ă  faire plus frais, le vent souffle et je suis trempĂ©. Pour Ă©viter d’attraper froid, je rĂ©ussi Ă  attraper un cache cou dans mon sac et l’enfile immĂ©diatement. Dans la montĂ©e je sens mon psoas douloureux ce qui me fait douter pour la suite, la route va ĂȘtre longue et sinueuse. Mais je fais travailler mon mental pour faire traileur m’a expliquĂ© qu’il fallait Ă  tout prix ne jamais laisser s’ouvrir la faille psychologique. Il m’a donnĂ© un exemple trĂšs concret celui d’avoir envie d’aller aux toilettes quand on est dans un embouteillage. Si une envie pressante vous prend et que vous n’avez d’autre choix que d’attendre, alors vous attendrez et arriverez Ă  en faire abstraction. Laisser la faille psychologique s’ouvrir, c’est le moment oĂč on arrive enfin devant la porte de chez soi, que l’envie se fait sentir de plus en plus pressante et que l’on panique Ă  sa porte d’entrĂ©e avec ses clĂ©s. Et bien lĂ  c’est pareil, lorsque s’entrouvre la faille psychologique, il faut la refermer immĂ©diatement. Pour cela, je me rĂ©pĂšte “je t’interdis d’avoir des pensĂ©es nĂ©gatives”. Je visualise un mur en roche dans lequel une faille essaie de grandir. Et dans ma tĂȘte, j’arrive Ă  renforcer le mur avec du bĂ©ton, pour ne rien laisser Ă  mesure qu’elle lutte pour s’ouvrir. Ça peut paraĂźtre abstrait mais ça km, nous quittons les chemins et attaquons une portion sur route assez raide. Il y a encore beaucoup de gens qui nous encouragent et nous applaudissent. Dans un virage, les supporters se resserrent pour ne laisser passer qu’une seule rangĂ©e de coureur, Ă  la façon du col de l’Alples d’Huez au Tour de France. Le kiffe de se sent fort, les gens nous appellent par notre prĂ©nom grĂące aux dossard, ça tape dans le dos, dans les mains ça donne une force considĂ©rable. Je ralentis et demande “Excusez-moi, je cherche le stade de la redoute svp ?”Cette vanne que je rĂ©utiliserai plusieurs fois fonctionne super bien. Ils m’expliquent que c’est juste aprĂšs la montĂ©e Ă  droite. “Ahhh super nouvelle ça !”. En rĂ©alitĂ©, c’est Ă  environ 155 km de lĂ , 9000 m de dĂ©nivelĂ© en profite au maximum de tout ce qui se passe, je suis encore Ă  moitiĂ© euphorique, pas encore concentrĂ© Ă  100% sur la course. “Fais attention Ă  ne pas te blesser et avance”.Sur la route, je remonte par hasard au niveau de la dame avec qui j’étais assis sur les tables avant le dĂ©part, elle n’est dĂ©jĂ  plus avec son mari mais m’explique qu’ils ne font jamais la course ensemble car ils n’ont pas le mĂȘme rythme. Mais ils finissent toujours par se retrouver sur le parcours. Je trouve ça mignon. Et je file devant elle ! Je ne la reverrai VIDOT - 14,7 KM 656 d+Je passe Ă  la TĂ©lĂ© ! 1er vrai ravito. Je suis 5 minutes en dessous de mes prĂ©visions. J’en profite pour remplir mes bidons et manger un peu de tout fromage, quartier d’orange, est minuit passĂ©, c’est Vendredi ! Je m’apprĂȘte Ă  repartir quand je vois plusieurs coureurs se changer. Ils ont raisons, mieux vaut perdre 2 minutes ici et ne pas attraper froid. J’enlĂšve la frontale le sac, le dossard. Je retire mon t-shirt officiel qui est trempĂ© et enfile ma seconde peau manche longue. Je repars du ravito quand soudain
 PAF LE BOUCHON. Bon, je m’y attendais donc ça passe mieux. Nous sommes Ă  l’arrĂȘt complet, sauf pour 2–3 petits gĂ©nies qui ont visiblement rĂ©ussi Ă  chopper des “fast-pass” au ravito. J’adore ces mecs qui te doublent comme si c’était toi qui choisissait de ne pas avancer dans un bouchon, “excusez-moi, pardon, on est pressĂ©â€. Ah oui c’est vrai, pas nous. Vivement la VAR sur les dĂ©tendre l’atmosphĂšre, je sors mon tĂ©lĂ©phone, le mets en mode selfie et balance un “SALUT LES LUCIOLES !”.Ça ne fait pas rire grand monde, mais je suis hyper content de ma blague. Je viens de manger 15 km avec 700 d+ et je suis en pleine forme. Et lĂ  on va attaquer une trĂšs grosse partie, 10km avec 1000 d+avec du petit single de forĂȘt, des racines, des marches. MĂȘme pas peur. Pour dire la vĂ©ritĂ©, je n’ai que quelques flash de cette partie. Le fait d’ĂȘtre dans les bouchons, Ă  la file indienne, de n’avoir que le sac et les mollets du coureur de devant dans le champs de vision n’aide pas le cerveau a crĂ©er des super souvenirs. Ce que je sais, c’est que ça monte sec mais je le vis super vu de jour, extrait de RĂ©union 1Ăšre toute façon, je vis bien toutes les montĂ©es de maniĂšre gĂ©nĂ©rale. Je ne saurais pas l’expliquer, je les ai travaillĂ©es Ă  l’entrainement mais pas excessivement. Je suis hyper Ă  l’aise dans l’exercice. Je double toujours beaucoup de gens dans ces portions, et je me fais doubler en descente. C’est plutĂŽt un bon compromis Ă  mon niveau. J’ai bien retenu les leçons d’Antoine Guillon Champion du monde, 12 participations Ă  la Diagonale, 1 victoire et 10 fois dans le top 4 toujours aller chercher le point le plus bas quand on monte pour prĂ©server l’énergie, et le point le plus haut quand on descend pour Ă©viter au maximum les chocs. Les bouchons vont et viennent pendant plusieurs km selon les endroits plus ou moins Ă©troits dans lesquels nous passons. Je fais bien attention Ă  mon hydratation. “Si tu ressens la sensation de faim ou soif, c’est dĂ©jĂ  trop tard.” Ça devient silencieux sur les sentiers. Je relance toujours aussi aisĂ©ment en haut des cĂŽtes sur les petits passages plats. On commence Ă  ĂȘtre trĂšs haut avec une super vue sur la baie Ă©clairĂ©e par les lumiĂšres de la ville et le reflet de la lune. L’environnement est surrĂ©aliste, il y a des arbres, de l’herbe, de la verdure partout autour de nous, c’est trĂšs dense. L’air est frais et pur. C’est hyper agrĂ©able, beaucoup plus que les Buttes Chaumont. On grimpe, on grimpe et lorsque l’on croit que l’on arrive en haut, ça grimpe encore plus. J’adore cette partie. Peut-ĂȘtre parce que je suis frais et que j’ai l’impression que les autres autour de moins ont moins d’aisance. Loin de moi l’idĂ©e de me rĂ©jouir du malheur des autres mais ça me donne la sensation d’ĂȘtre dans une forme olympique. En vĂ©ritĂ©, si demain je devais y retourner seul et en pleine journĂ©e, je serais sĂ»rement en on avance, plus le dĂ©cor change. On est maintenant beaucoup plus haut et il y a plus de mousse sur les arbres, c’est de moins en moins dense. Je vois un homme s’endormir en marchant rattrapĂ© de justesse par la personne derriĂšre avant de se prendre l’arbre en face de lui. Ah ouais, dĂ©jĂ ...À droite c’est le vide, protĂ©gĂ© par une clĂŽture. C’est un trou noir sans fin. En continuant sur le sentier je vois un homme assis le regard livide. Puis quelques dizaines de mĂštres plus loin, un autre en pleurs au tĂ©lĂ©phone. Il semble dire qu’il n’a plus de jambes. On est Ă  peine au 20Ăšme km, je pense que la suite va ĂȘtre compliquĂ©e pour eux. Mais le trail c’est aussi ça. Être au plus mal et se dire que rien ne pourra ĂȘtre pire par la suite pour remonter la pente. Il y a d’autres personnes assises sur le bord du sentier Ă  mesure que l’on avance, je leur tape sur l’épaule en passant, “bon courage mon pote”.Il commence rĂ©ellement Ă  faire froid lĂ  haut, on est quasiment Ă  1800 mĂštres d’altitude et le vent souffle fort. Il y a quelques heures nous Ă©tions au niveau 0, au bord de l’ocĂ©an Indien Ă  25 degrĂ©s. LĂ  il fait presque ressenti 0 degrĂ©. Je m’arrĂȘte pour remettre de la crĂšme sur mes pieds, je sens le frottement au talon dans les pentes. Je veux Ă  tout prix Ă©viter l’ampoule prĂ©maturĂ©e. Je prĂ©fĂšre laisser Mafate faire son boulot pour ça. Je profite de mon arrĂȘt furtif pour enfiler ma veste Raidlight. Wow. Incroyable. La qualitĂ© de cette veste
 elle est lĂ©gĂšre, respirante, elle coupe parfaitement le vent et est impermĂ©able. Ce n’est pas la mienne, on me la prĂȘtĂ©e mais j’en suis dĂ©jĂ  convaincu. Au terme d’une Ă©niĂšme montĂ©e, il reste 2 km de faux plat sur lesquels j’envoie avant d’arriver au ravitaillement du 25Ăšme DAME DE LA PAIX - 25 KM 2071 D+Depuis Domaine Vidot 10 km /1000 d+Temps de course 45856PrĂšs de 5 heures de course, il est 2h58 du matin quand j’arrive au ravitaillement. Je suis en pleine forme. Mentalement ĂȘtre sous les 5h Ă  cet endroit me fait du bien. Le ravito est installĂ© dans un chemin entre les arbres, ce n’est pas trĂšs large et ça s’entasse beaucoup. Certains coureurs ont le visage dĂ©jĂ  largement marquĂ©s. D’autres dorment dĂ©jĂ . Il y a de la soupe au vermicelle au ravito, j’attrape mon Ă©co-cup et j’en demande une bonne louche. Ça va me rĂ©chauffer, on doit pas ĂȘtre loin de 0°C ici. Je me ravitaille en sucre, mais aussi en sel. Toujours surveiller ses apports en sucre et en sel. Je demande une belle pincĂ©e que je mĂ©lange avec de l’eau et SLURP, je l’avale cul sec. C’est dĂ©licieux
 Je resterai 10 minutes environ, le temps de m’assoir 5 minutes, de finir de boire ma soupe et repartir du bon pied. J’ai presque 45 minutes d’avance sur mes prĂ©visions !À la sortie du ravito, on avance sur une route bĂ©tonnĂ©e trĂšs trĂšs raide pendant 1 bon kilomĂštre. Ah ! La fameuse route amĂ©nagĂ©e spĂ©cialement en 2018 pour Ă©viter les bouchons
 Une fois lĂ -haut, je me rappelle voir un ciel plein d’étoiles au dessus de moi. J’éteint ma frontale et regarde en l’air. C’est sublime. Puis on redescend aussi sec avant de prendre un petit chemin Ă  droite pour s’enfoncer dans un champs, et BAM. Encore un bouchon
 Yessssss ! Encore Ă  l’arrĂȘt complet. Toute la portion suivante est un enchainement de petites montĂ©es et descentes trĂšs raide Ă  travers des champs, d’escalade d’échelles qui nous permettent de passer au dessus de clĂŽtures en barbelĂ©s. Ça avance en ligne droite. À gauche, des champs, Ă  droite, 500 mĂštres de vide. Les bouchons nous font perdre Ă©normĂ©ment de temps, ça me frustre mais c’est le jeu. À mon niveau et Ă  ma vitesse on mange les bouchons, c’est comme ça. Et je ne suis pas au bout de mes Google profite pour discuter avec mes voisins. L’un d’eux est un finisher de l’édition prĂ©cĂ©dente, il m’explique qu’il a eu Ă©normĂ©ment de mal Ă  terminer et qu’il a effectuĂ© les 20 derniers km en 10h car il a dĂ» s’arrĂȘter dormir 1h Ă  4km de l’arrivĂ©e. Je n’imagine mĂȘme pas l’état dans lequel il devait ĂȘtre pour que son envie d’arriver ne prenne pas l’ascendant sur sa fatigue. Ça parait si loin cette arrivĂ©e
 Mais je ne dĂ©sespĂšre absolument pas. À vrai dire j’ai l’impression de toujours ĂȘtre celui qui a le plus la patate dans les petits groupes avec lesquels j’avance. Les autres sont assez silencieux, concentrĂ©s. Les montĂ©es et descentes dureront prĂšs de 2h. Cette portion est trĂšs casse patte, diffĂ©rents muscles sont sollicitĂ©s de maniĂšre intense Ă  tour de rĂŽle. J’ai beau essayer de faire abstraction de la douleur que je ressens au psoas, c’est le bassin qui commence Ă  subir Ă  son tour. Logique, l’un va avec l’autre. Je fais tout pour ne pas y est presque 5h30 du matin quand nous arrivons sur une trĂšs belle partie. Un chemin de forĂȘt magnifique. Pour essayer d’imager l’endroit, on dirait une piste verte au ski, vous savez les chemins interminables, pas trĂšs larges, qui permettent gĂ©nĂ©ralement de redescendre Ă  la station. C’est ça. Les premiĂšres lueurs du jour se dessinent. FIN DE LA PREMIÈRE NUIT. Elle s’est super bien passĂ©e, j’ai toujours autant la patate !Il y a des arbres de part et d’autres, un terrain plat et roulant sur l’herbe. C’est la partie la plus agrĂ©able du parcours pour les jambes et les pieds, j’en profite pour envoyer un peu, je sais que ça ne va pas dont je parle juste avant. Extrait de de soleil se lĂšve et nous profitions d’une vue magnifique sur les pics de montagnes qui surplombent les nuages et la brume matinale. Nous quittons ce beau sentier et rejoignons la route du Volcan que nous descendons sur 500 mĂštres avant de remonter vers les plaines. C’est magnifique, comme sur les vidĂ©os que j’ai vues avant de venir. Mais cette fois-ci j’y suis bien en vrai, en ressentant la fraicheur de l’air et la chaleur du soleil qui se chemin est technique, cassant, mais qu’est-ce que c’est beau. J’avance derriĂšre un homme qui me raconte qu’il a tentĂ© sa chance l’annĂ©e derniĂšre, mais qu’il a malheureusement Ă©tĂ© contraint d’abandonner Ă  Roche Plate 105 km juste avant le mur du MaĂŻdo. Les semelles sous ses chaussures n’ont pas supportĂ© la traversĂ©e du cirque de Mafate et se sont dĂ©collĂ©es. Avec plus de luciditĂ©, il m’explique qu’il aurait pu les rĂ©parer avec son rouleau d’Elastoplast et changer de chaussure 20 km plus loin Ă  Sans Souci lĂ  oĂč son sac d’assistance l’attendait. Comme quoi
 la luciditĂ© c’est vraiment la clĂ© avant de prendre une quelconque continuons dans des petits sentiers Ă©troits jusqu’au 38Ăšme km, ravitaillement BelvĂ©dĂšre Nez de boeuf. Ces derniers km m’ont littĂ©ralement cassĂ© les DE BOEUF - 38 KM 2406 D+Depuis Notre Dame de la Paix 13 km / 700 d+Temps de course 82558La pluie, le vent et le froid se sont invitĂ©s au ravito. Nous en sommes Ă  8h25 de courses exactement, il est 6h25 du matin. J’ai plus de 3h d’avance sur la barriĂšre horaire, je suis trĂšs de boeuf. Extrait de ne va pas falloir trainer pour ne pas se refroidir, mais je profite une nouvelle fois de la soupe aux vermicelles pour me rĂ©chauffer. J’aperçois une belle marmite de Rougail saucisse posĂ©e sur la table, mais visiblement c’est pour l’autre course en relai qui se dĂ©roule en parallĂšle. J’en pique une mini assiette et la dĂ©vore aussi vite. Mine de rien, j’ai beau ĂȘtre enthousiaste depuis le dĂ©but de la course, ça fait tout de mĂȘme 38 km que l’on monte et on a perdu 25 degrĂ©s depuis le dĂ©part. Et ça fait presque 24h que je n’ai pas dormi, donc malgrĂ© les apparences l’organisme est dĂ©jĂ  un tout petit peu entamĂ© mĂȘme s’il reste Ă©normĂ©ment de chemin Ă  parcourir. Au ravito, j’en vois certains dans un sale Ă©tat proche de l’hypothermie. Il y en a qui dorment dans les couvertures de survie, d’autres qui grelottent le regard vitreux. Je ne veux pas finir dans le mĂȘme Ă©tat. Vite je remplis mes gourdes, je finis ma bouchĂ©e et je m’en vais d’ici. Je suis pile Ă  l’heure dans mes portion qui suit est un sentier de 11 km de descente vers Mare Ă  Boue oĂč Patrick et mon pĂšre m’attendent. Le terrain est assez technique par endroit, trĂšs roulant Ă  d’autres. Il y a beaucoup de roche et de cailloux sur les Ă©troits sentiers, il faut faire attention Ă  ne pas y laisser une cheville, ça va si vite
 J’arrive Ă  courir par de temps en temps, mais obligĂ© de ralentir par endroit. Je me fais remonter sur les passages techniques, ça sera mon plus grand drame tout au long de la course. À ma dĂ©fense le boulevard Magenta, la butte Montmartre et les Buttes Chaumont ne sont pas les meilleurs terrains de jeu qui soient pour prĂ©parer les sentiers de la RĂ©union !Il y a des barbelĂ©s sur les bords du sentier, j’ai dĂ©jĂ  vu cet endroit dans les de continuons la descente qui s’intensifie et entamons des passages plus techniques avec des marches. C’est assez casse patte car elles sont trop longues pour ne faire qu’un pas, mais trop courtes pour en faire 2. Et surtout elles mesurent entre 30 et 50 cm de haut donc c’est assez traumatisant pour les genoux et les muscles. Le temps est capricieux; un coup il fait trĂšs froid, un coup il pleut, un coup il fait trop chaud. J’ai toujours ma seconde peau et ma veste sur moi. AprĂšs de longues minutes Ă  virevolter dans un petit sentier accidentĂ© entre les arbres, les pierres et les racines, j’aperçois enfin des humains, et surtout, mon pĂšre qui m’ de traversons une grande route, ce qui semble ĂȘtre la route principale environnante. Je fais les quelques mĂštres restants avec mon pĂšre jusqu’au ravitaillement 500 mĂštres plus mettrai environ 2 heures Ă  faire ces 11 km. La À BOUE — 49 KM 2446 D+Depuis Nez de boeuf 10,3 km / 40 d+Temps de course 104956VoilĂ  10h50 que nous sommes lancĂ©s dans cette Diagonale des fous, et presque 1/3 du parcours. En vĂ©ritĂ©, pas du tout, j’en suis Ă  peine Ă  20% en termes de temps passĂ©. Je sais ce qui m’attend, Cilaos, Mafate, les 50 derniers km, la fatigue accumulĂ©e. Je reste lucide et ravitaillement j’en profite pour faire le plein d’eau, manger quelques morceaux de poulet, de sucre, de chocolat, d’orange. Je reprends un verre d’eau avec du sel par anticipation des litres de transpiration que je vais perdre dans la chaleur environnante. J’en profite pour changer de chaussettes, les pieds vont super bien jusqu’à maintenant, pourvu que ça dure. Utopie. Je change les piles de ma frontale pour la prochaine nuit, et je dĂ©pose la deuxiĂšme frontale de secours Ă  mon pĂšre. Elle ne me servira Ă  rien finalement, si ce n’est Ă  m’alourdir un peu plus. Ma Black Diamond est rĂ©sistante et c’est un vrai phare Ă  pleine puissance, mais je dois avouer qu’elle est peu pratique. Son chargeur a 4 piles est trop lourd pour ĂȘtre portĂ© au niveau de la tĂȘte, et se trainer une rallonge dans le short ou dans le sac n’est pas idĂ©al. C’est con, maintenant qu’on a passĂ© plusieurs nuit ensemble je commence Ă  m’y attacher
 Le soleil commence Ă  se lever et il fait dĂ©jĂ  plus chaud, malgrĂ© un vent toujours aussi frais. Je discute avec un homme au ravitaillement, il a l’air de bien connaĂźtre le coin. Il m’explique qu’il compte bien 5h pour rejoindre Cilaos, Ă  17 km plus loin. 5 heures ! J’en ai prĂ©vu 4 et je pensais ĂȘtre large ! Il me dit que la portion que l’on va attaquer est super compliquĂ©e. Outch. Je n’ai pas envie de le croire
Sur le profil et dans les vidĂ©os, il s’agissait pour moi d’un simple chemin de plaine technique avec des montĂ©es et descentes par endroit mais qui n’avait pas l’air d’ĂȘtre aussi compliquĂ©. Je sais juste qu’il y a un mur vertical qui nous attend pour descendre Ă  Cilaos au 63Ăšme km et que beaucoup redoutent. On verra bien. Je repars sans plus tarder, il est 9h15, on va entrer dans le vif du Ă  peine reparti que je retire dĂ©jĂ  ma veste. Il commence Ă  faire trĂšs chaud au dessus des nuages. Je garde ma seconde peau sur moi, les variations de tempĂ©ratures vont trĂšs vite. Et nous repartons pour une ascension de 10 km. Ça dĂ©marre assez doucement, dans un chemin de fait trĂšs chaud. L’endroit qui se voulait trĂšs sec porte dĂ©sormais trĂšs bien son nom “Mare Ă  boue”. L’ascension est interminable. Je n’étais pas prĂȘt psychologiquement. Plus on avance, et plus ça devient technique et compliquĂ©. J’accroche un local avec lequel je discute pendant quelques kilomĂštres, il me dit que le plus dur est Ă  venir. Que ça monte rĂ©guliĂšrement maintenant mais que l’on va se manger une portion de 5 km sur les crĂȘtes avec des montĂ©es et descentes trĂšs rudes sur un terrain capricieux. De trĂšs gros rochers, des racines. Tout ce que j’ en effet il ne s’est pas trompĂ©. On avance pourtant dans un endroit sublime, sur une crĂȘte avec le vide de chaque cĂŽtĂ© et une vue le terrain devient hyper compliquĂ© aussi bien dans les montĂ©es que dans les descentes. Comme ça Extrait de de de sur plusieurs kilomĂštres; un cauchemar. Et qui dit sentier Ă©troit et technique dit
 BOUCHON. Super nouvelle. Je ne peux pas avancer Ă  mon rythme, je ne peux pas doubler et je commence Ă  m’agacer. Pire, je fatigue et vois l’heure tourner et je fais un kilomĂštre en prĂšs de 35 minutes ! Je me pose des questions sur les barriĂšres horaires et la suite de la course, probablement Ă  tort. Sur des parties oĂč les montĂ©es et descentes raides se succĂšdent, on se fatigue mais on n’avance pas beaucoup. Les kilomĂštres sont interminables et le dĂ©nivelĂ© ne bouge presque dĂ©cide de faire une pause de 2 minutes pour manger une barre de nougat. Un homme s’arrĂȘte Ă  ma hauteur, il est sur le GR en relai. Il m’explique qu’il est rincĂ©, qu’il est parti Ă  6h ce matin et qu’il n’a plus de jambes. Je le souhaite bonne chance. Je repars, ça grimpe sĂ©vĂšrement mais je ne me plains plus. Je passe en mode Blaise Matuidi. Je l’adopterai plusieurs fois dans la course, merci d’exister Blaisou. Nous sommes sur le coteau Kerveguen, il me semble que c’est le plus haut point du parcours. Il fait trĂšs trĂšs chaud lĂ -haut. Puis comme tout droit sorti d’un Mission Impossible, un hĂ©licoptĂšre surgit de derriĂšre le col que nous montons et se place Ă  une trentaine de mĂštres de moi. La porte s’ouvre, tu vas passer Ă  la TĂ©lĂ© ». Je m’agite et fais des grand signes des 2 bras. Ils s’approchent et viennent se placer au 3 mĂštres dessus de moi
 Merde qu’est-ce qu’ils font ? Je dĂ©connais hein! Je me fais sĂ©vĂšrement chasser par la puissance de l’hĂ©lice, la poussiĂšre vole j’en prends plein la tĂȘte et je me couche au sol par rĂ©flexe. J’imagine le pire, le coup de vent, le pilote qui perd le contrĂŽle, l’hĂ©lice qui me dĂ©coupe
 L’hĂ©lico se dĂ©cale de quelques mĂštres. Un homme descend via un cĂąble dans les petits arbres de la crĂȘte, comme Kevin Costner dans Coast Guards, et remonte 10 secondes plus tard dans un homme enroulĂ© dans sa couverture de survie. AH PUTAIN C’EST PAS LA TÉLÉ. Merci Sara 112. Cet Ă©pisode me rappelle qu’il faut rester concentrĂ© et qu’une blessure peut survenir Ă  tout moment. Que mĂȘme si ça doit ĂȘtre trĂšs sympa de faire de l’hĂ©lico Ă  la RĂ©union, je ne suis pas sĂ»r que ma mutuelle couvre les frais. L’hĂ©lico s’en va aussi vite qu’il est kilomĂštre, le moment tant attendu. La fameuse descente vers Cilaos, celle dont tout le monde parle tant, 800 mĂštres de dĂ©nivelĂ© nĂ©gatif en 2 km. Surtout, la fin de cette montĂ©e interminable de 10 km. Place Ă  du bon 40% avec l’équipe type racines, roche, marches de 50 cm et
 UN BOUCHON ! Je me dis qu’en bas je vais enfin pouvoir voir mes proches, me changer, me faire masser voire mĂȘme me doucher. Évidemment ça n’avance pas, car il suffit qu’il y en ait un qui n’arrive pas Ă  descendre Ă  un rythme linĂ©aire et c’est 20 personnes qui subissent. Je ne dis rien, je serai ce mec Ă  2–3 endroits dans la course. C’est hyper dangereux, c’est super raide, ça glisse, j’en vois quelque uns chuter. 30 min pour faire le 1er km je deviens fou. Je crie un “GAUCHE” et accĂ©lĂšre pour doubler une dizaine de personnes, et ainsi de suite sur 3 lacets pour me retrouver seul devant. Je garde le rythme. Il faut que ça se termine. On n’en voit toujours pas le bout, on est encore au dessus des nuages, j’ai beau descendre encore et encore le dĂ©cor ne bouge pas. Puis tout Ă  coup on aperçoit le sol. Sans dĂ©conner ? On est encore si haut que ça ? Au moins 400 mĂštres
 Je prends mon mal en patience, je finis par arriver, je ne sais pas combien de temps ça a pris exactement. Peut ĂȘtre 45 min... Ça a bien tapĂ© les genoux mais au moins je suis en bas. Ravito surprise, celui de Mare Ă  Joseph. Moi qui pensait arriver bientĂŽt Ă  Cilaos, j’apprends qu’il y a encore 4 km
 Je repars en courant, j’arrive Ă  faire du 10 km/h sur une partie en bĂ©ton. Au bout de 2 km, j’aperçois Patrick qui est venu Ă  ma rencontre. Il se met Ă  mon niveau et nous courrons tous les 2. “On arrive ?”, il me rĂ©pond “non, on a 1 km, puis une ravine Ă  passer”.“MAIS JAMIE, C’EST QUOI UNE RAVINE ?”TCHOU. Sound design de la petite TV qui s’éteint dans “C’est pas sorcier”Une ravine c’est un petit ravin entre 2 montagnes oĂč il y a gĂ©nĂ©ralement un cour d’eau qui y passe. Donc si on imagine 2 montagnes l’une Ă  cĂŽtĂ© de l’autre, c’est l’endroit entre les 2. Passer une ravine, ça veut dire descendre d’un flan de montagne pour remonter en face. Je prends du temps pour l’expliquer parce que ça va devenir frĂ©quent sur les 50 prochains un petit schĂ©ma. /\ravine/\Je descends la ravine Ă  pleine jambe et la remonte aussi vite. Mon pĂšre nous attend de l’autre remontons et arrivons enfin Ă  Cilaos Ă  14h20. J’arrive avec 1h20 de retard sur mes prĂ©visons, je n’avais pas anticipĂ© la difficultĂ© des 17 derniers — 66,2 KM 3256 D+Depuis Mare Ă  boue 17 km / 810 d+Temps de course 162113Je retrouve Laura, son pĂšre et mes parents Ă  Cilaos, comme prĂ©vu. Ça fait du bien de les portent des t-shirt “supporter de Thibault” soigneusement confectionnĂ©s par Laura. Je trouve ça super mignon. En revanche j’ai un gros coup de mou, le vrai premier de la course. Ça ne me fait pas peur, il y a une trĂšs belle phrase que l’on m’a dite un jour pour passer ces moments difficiles “Dis toi que lorsque tu es au plus bas, ça ne peut qu’aller mieux ensuite”. C’est con mais c’est vrai, ça finit toujours par passer Ă  un moment oĂč un dans le stade de Cilaos, la premiĂšre base de vie de la course. Il y a tout repas chaud, kinĂ©s, osthĂ©os, podologues, mĂ©decins, lits de camps, douche. Cilaos c’est un peu le SAS avant d’attaquer l’enfer de Mafate. D’ailleurs sur tous les abandons, j’aimerais bien voir combien laissent le dossard Ă  Cilaos... Oui car quand on entre dans Mafate, il faut en sortir par ses propres moyens sauf en cas d’urgence absolu qui empĂȘcherait de marcher et lĂ  c’est l’hĂ©lico qui s’en charge. Mafate, ce n’est pas accessible en voiture. Dans ma tĂȘte je l’imagine un peu comme le cimetiĂšre des Ă©lĂ©phants dans le Roi Lion. Donc il faut ĂȘtre bien sĂ»r de soi avant de s’y lancer !Je subis un peu le coup de mou, j’essaie de manger un plat chaud mais il a du mal Ă  bien passer. Je me dis qu’une douche peut faire le plus grand bien
 Et qui dit stade dit vestiaire de Foot ! Ahhhhh, la belle Ă©poque. Je me revois 10 ans en arriĂšre dans les vestiaires du SOM ou du Villaret. Le sol est inondĂ© de 3 cm d’eau, les douches ne laissent passer qu’un petit simple filet d’eau glacĂ©e, chacun taxe le gel douche de l’autre. Je change de chaussettes et de t-shirt. Je remplace ceux qui sont dans le sac par des vĂȘtements secs pour la nuit, je change de pile pour la frontale, remets des barres et compotes Ă©nergĂ©tiques dans mon sac. Je ne traine pas, j’aimerais passer voir les kinĂ©s pour me faire masser les jambes, faire le point sur mon psoas / bassin avec un osthĂ©o, me faire soigner 2 ampoules naissantes derriĂšre les talons. Et si possible dormir 10 commence par le kinĂ© et lĂ  c’est grand luxe. Je suis pris en charge par 2 jeunes filles, 1 par tente des kinĂ©s. Extrait de troisiĂšme arrive c’est une podologue qui enduit mes talons d’une crĂšme prĂ©ventive. Puis une 4Ăšme ! OsthĂ©o, elle m’annonce une contracture au psoas, que le bassin bouge bien par contre ce qui est bon signe. Je lui dis que je ne sens presque plus la douleur et que ça va aller. En 10 minutes, j’ai amorti le prix du dossard en consultation mĂ©dicale. Merci Ă  tous ces bĂ©nĂ©voles qui sont d’une aide prĂ©cieuse. Le corps va bien mais je me sens toujours assez faible, je vais essayer de dormir 10 min. Je m’allonge, rien Ă  faire ça ne viendra pas. Je repars. C’est dur mais il faut y aller. Il me semble qu’il est 15h40 quand je repars, ce qui voudrait dire que je suis restĂ© au total 1h15 sur place environ. Ce que j’avais prĂ©vu. J’ai toujours entre 2h30 et 3h d’avance sur la barriĂšre. Je dis au revoir Ă  mes proches, mon pĂšre m’accompagne sur quelques centaines de mĂštres et me laisse filer dans les sentiers. J’en profite pour brancher ma montre pour qu’elle se recharge sur cette partie. Pendant la course, ma batterie externe me permettra de la charger 3 fois pour ne pas qu’elle s’éteigne en pleine activitĂ© et de charger 3 fois mon nouvelle fois, j’ai fait une erreur d’apprĂ©ciation du parcours. Je pensais que les 6,8 km qui sĂ©paraient Cilaos du DĂ©but du Sentier du TaĂŻbit Ă©taient relativement simples et finalement on se prend prĂšs de 600 d+/d- avec des montĂ©es et descentes successives. On descend jusqu’en bas d’une ravine pour arriver Ă  la Casacade Bras rouge et on enchaĂźne des montĂ©es descentes avant d’arriver au ravitaillement du dĂ©part du TaĂŻbit. Bon finalement avec le recul je me dis que c’est toujours ça de SENTIER DU TAÏBIT — 73 KM 3763 D+Depuis Cilaos 6,8 km / 507 d+Temps de course 192622Qui dit dĂ©but du sentier du TaĂŻbit, dit TaĂŻbit. La 2Ăšme plus grosse ascension de cette Diagonale des fous. Un mur de 4,5 km avec plus de 800 dĂ©nivelĂ© positif, et une descente de 1,5 km et 400 de dĂ©nivelĂ© nĂ©gatif pour arriver Ă  remplis mes gourdes au ravitaillement, je mange quelques quartiers d’orange. Les pieds sont un peu douloureux, j’en profite pour remettre de la NOK et prendre un doliprane. Je suis prĂȘt Ă  en dĂ©coudre. Bizarrement ce col ne me fait pas peur, il est raide mais ça fait des semaines que j’ai hĂąte de voir ce que c’est pour de vrai. J’attaque sur un gros rythme et double du monde. Si il y a bien un truc dont je suis fier c’est qu’on ne me double jamais en montĂ©e. Non pas que je sois un monstre, mais Ă  mon niveau, je dois ĂȘtre un poil plus Ă  l’aise que les autres. Ce qui veut dire que si je progresse en descente je pourrai gagner du temps !Je continue de monter Ă  un rythme rĂ©gulier. Au bout de 2 km d’ascension, je croise la fameuse cabane en plein milieu des bois avec son fameux propriĂ©taire qui nous attend sur le bord de la route de l’ai vu dans toutes les vidĂ©os que j’ai regardĂ©es, il fait partie de la lĂ©gende de cette diagonale . Il a concoctĂ© sa fameuse “tisane ascenseur”. Je m’en passerai
 Certainement Ă  tort. Peut ĂȘtre que j’aurais dĂ» profiter de ce moment, m’arrĂȘter. Je me suis contentĂ© de lui taper dans la main et j’ai continuĂ© sur ma lancĂ©e pour ne pas casser mon bon rythme. Le soleil se couche trĂšs vite, c’est le dĂ©but de la deuxiĂšme nuit. J’enfile la veste et allume la frontale, nous sommes trĂšs haut maintenant. Le TaĂŻbit, c’est des marches Ă  n’en plus finir. Nous sommes en plein dans un nuage, l’endroit est trĂšs brumeux. Je me sens en pleine forme. Le coup de mou de Cilaos est loin derriĂšre. Je monte
 5, marche aprĂšs marche, 4
 Tout va bien, 3.. TrĂšs bien
 2, allez encore une personne doublĂ©e, 1
 CLAC. Ma course sommes au kilomĂštres 78 environ, ce n’est pas encore la moitiĂ©. Mon tendon de la patte d’oie au genou gauche s’est rĂ©veillĂ©e comme un vieux volcan rĂ©unionnais. Comme ça, sans prĂ©venir. Pour dĂ©crire la douleur que je ressens Ă  chaque pas, c’est exactement la mĂȘme sensation que lorsque vous mettez une touillette Ă  cafĂ© entre vos dents et la faites vibrer avec votre doigt. La touillette incarnant mon tendon dans cette mĂ©taphore. J’espĂšre que ça va passer. J’en appelle Ă  ma tĂȘte. “J’ai vu Kylian Jornet se blesser au genou Ă  Cilaos et finir la course. Il est capable de faire abstraction de la douleur des blessures, fais pas ta chochotte.” J’essaie d’appliquer une mĂ©thode qui consiste Ă  visualiser la douleur dans son corps, la matĂ©rialiser, la dĂ©coller et la poser quelque part. Ça marche ! CLAC. Ah non
 Bon, avance et fais suis un peu déçu d’ĂȘtre ici de nuit, apparement le paysage est magnifique vu d’en haut. Tant pis, je serai plus rapide l’annĂ©e prochaine poke Laura ! Je reconnais la petite chapelle sur ma gauche pendant l’ascension ce qui annonce la fin de la montĂ©e. J’ai mis environ 1h30 Ă  grimper ! À mon niveau, je l’ai mangĂ© en une bouchĂ©e. Lui qui inflige du mal Ă  tant de coureur je ne lui ai pas laissĂ© une seule chance. Il aura simplement pris mon tendon dans la bataille mais hey, Luke a perdu un bras avant de faire chuter l’empire. C’est le place Ă  la descente. Clac, droite, clac, droite, clac, droite. Ok ça devient systĂ©matique, 1 par sur 2 dĂšs que je mets de l’amplitude. J’ai la solution ! Ma genouillĂšre
 Et merde. PremiĂšre erreur. Elle se trouve Ă  des dizaines de km d’ici et personne ne peut accĂ©der oĂč je suis. J’avais hĂ©sitĂ©, mais je ne l’ai pas prise. Le seul endroit oĂč je pourrai la rĂ©cupĂ©rer c’est Ă  36 km de lĂ , au sommet du MaĂŻdo, la plus grosse ascension de la course. Celle obligatoire pour sortir de Mafate. Outch il va falloir ĂȘtre descente pour rejoindre Marla est raide, difficile, technique. Mais je ne sais pas pourquoi dans la nuit ça passe un peu mieux, peut ĂȘtre parce que je ne vois pas oĂč je vais
 Je suis tellement focalisĂ© sur mon genou que j’en oublie le reste. J’aperçois les lumiĂšres de Marla en contrebas. La descente se termine, il y a quelques centaines de mĂštres de plat, j’en profite pour courir. Bienvenue dans Mafate pour 35 km d’enfer. J’aurai la chance et la malchance de traverser ce cirque de nuit. Certes je ne vais pas voir ce qui m’attend et ça m’aidera beaucoup psychologiquement, mais je vais rater de supers — 79,1 KM 4572 D+Depuis DĂ©but de sentier TaĂŻbit 6,1 km / 809 d+Temps de course 221351Il est 20h13, j’ai l’impression qu’il est minuit. Je commence Ă  ĂȘtre dĂ©phasĂ©. En mĂȘme temps ça fait presque 24h que l’on est parti, je n’ai pas dormi depuis 36h et j’ai 80 bornes et 4500 d+ dans les jambes. Je m’arrĂȘte quelques minutes Ă  Marla le temps de remplir les gourdes, manger un morceau. Je me suis assis quelques minutes, suffisament pour avoir un coup de barre. Je me tate Ă  dormir ici
 Ah je ne suis pas le seul ! Par terre en plein milieu du ravito il y a un trentaine de raideurs enroulĂ©s dans leurs couvertures de survie, on dirait un bac de bonbons papillotes argentĂ©s, ceux que l’on trouve Ă  NoĂ«l ! Je demande Ă  un bĂ©nĂ©vole si il y a des lits de camps pour dormir dans les prochains ravito, il me dit que non, qu’il faut aller jusqu’au 98Ăšme pour ça. Environ 7–8h plus loin donc. Il commence Ă  pleuvoir, super. Je ne rĂ©flĂ©chis pas et dĂ©cide de repartir. Je veux faire un maximum de chemin dans la nuit. Je me lĂšve de ma chaise, AÏE, mon tendon a refroidi lui aussi et c’est super douloureux. Je suis coureur me montre la tente des infirmiers, je vais les voir.“Coucou ! J’ai une petite douleur Ă  la patte d’oie”. Ils me rĂ©pondent - Ah bah on va te chercher la kinĂ©â€. Elle arrive. - Salut ! Qu’est-ce qui t’arrives ? - J’ai mal au tendon de la patte d’oie, une tendinite que je traine depuis 5 mois que je croyais soignĂ©e, mais non. Quand je marche il claque et lĂ  il a refroidi. Elle palpe le tendon. - Ah oui en effet c’est inflammĂ©- En effet
 Tu peux faire un truc ? - Non. Le mieux c’est que tu Ă©vites de marcher en rotation BAH MERCI ! On est probablement sur la course avec le terrain le plus accidentĂ© du monde mais “fais attention Ă  ta façon de courir et marcher”. Je vais rĂ©apprendre Ă  marcher droit dans Mafate c’est parti. Je m’imagine Ă  Paris, payer la consultation 70€
J’éclate de rire et lui demande si elle a Ă©tĂ© tĂ©lĂ©portĂ©e ici oĂč si elle a pu voir Ă  quoi ressemblent les sentiers ici ? Elle me rĂ©pond - Je sais c’est compliqué  Je peux te poser un bout de strap Ă  l’insertion pour Ă©viter qu’il claque mais je te garantie pas que ça va marcher. C’est de la mĂ©decine de comptoir. Tu peux mettre du baume du tigre si tu veux cool j’en ai dans mon sac, mais lĂ  on va pas faire de miracle. Tu es au stade 1 de la tendinite, ça peut le faire jusqu’au bout. Mais dis toi que ça ne pourra pas aller en s’amĂ©liorant. Elle s’exĂ©cute et me laisser Merci Ă  toi, bonne repars du ravito illico, un peu blasĂ© par l’aide apportĂ©e. Finalement au bout de 2 km, j’arracherai le strap qui me faisait encore plus mal.“Allo papa ? tu peux m’amener la genouillĂšre demain matin stp?”
 À ce mĂȘme moment, j’apprends l’arrivĂ©e des 2 premiers François D’HaĂšne et Benoit Girondel, main dans la main en battant le record de l’épreuve 23 heures 18 minutes et 48 secondes. C’est hallucinant. Ce sont des monstres. Comment font ils pour avancer aussi vite dans ces endroits ? On ne peut s’en rendre qu’en Ă©tant soi-mĂȘme sur cette Ă©preuve. Et moi je viens de passer la moitiĂ©. J’avance comme un zombie. On traverse une riviĂšre de galets, puis ça monte sec pendant quelques minutes sur des escaliers bien raides. Je me souviens parler avec le mec devant moi, mais je ne sais plus de quoi on a parlĂ©. J’ai rĂ©alisĂ© Ă  un moment qu’il Ă©tait plus lent que moi et que je m’étais confortĂ© dans son rythme. Je le double et rattrape un petit groupe devant. Nous sommes dans les Plaines des Tamarins il me semble, je reconnais le terrain relativement plat et la vĂ©gĂ©tation. On marche sur un terrain accidentĂ©, des racines, beaucoup de racines dans mes souvenirs. J’ai retrouvĂ© des jambes et j’ai envie de passer le moins de temps possible ici. On dirait le Sud
 dans les oreilles. Tiens marrant, on dirait pas la sud ici. Je rattrape encore un groupe que je double, et aperçois en face une belle montagne avec des lumiĂšres de frontale tout en haut. Ahhhhh, il va falloir monter !Une fille arrive Ă  ma hauteur, ou peut ĂȘtre que c’est moi qui suis arrivĂ© Ă  la sienne. C’est flou. Je ne sais pas Ă  quoi elle ressemble. La nuit tout n’est que formes, frontale et voix. On se parle pendant quelques kilomĂštres. Nous discutons. Elle m’explique la suite du parcours et comprend rapidement que je ne suis pas d’ici et que je n’ai aucune idĂ©e de ce qui nous attend. - 
 LĂ  on va monter le col des boeufs, et aprĂšs on va enchainer avec Sentier Scout pas longtemps aprĂšs. - Super nouvelle ça ! - T’es pas d’ici toi
 Tu viens d’oĂč ? - Paris, j’ai atterri ici il y a 2 jours. - Et tu es dĂ©jĂ  venu avant ? - Non. - Donc tu n’as jamais marchĂ© sur les sentiers de la RĂ©union ? - Ah bah si ! Ça fait 24h dĂ©jĂ  
 - Mais ça va ? - Nickel. J’ai un peu mal au genou, mais c’est super sympa chez T’es fou ? - Non je trouve ça cool comme challenge. C’est mon premier Grand lui explique que ma strat’ pour le grand raid, c’était surtout d’étudier le profil de la course km par km avec le dĂ©nivelĂ©, sans trop me soucier du terrain. Elle a un super rythme aussi, on double beaucoup de personnes dans la montĂ©e du col des boeufs. Je lui demande quelle partie elle redoute le plus, elle m’explique que c’est la triple ascension pour sortir de Mafate, avec le MaĂŻdo pour finir. Hein ? Triple ? Tu en haut du cul aprĂšs une belle ascension elle m’explique que l’on a quittĂ© Mafate pour quelques kilomĂštres et que l’on est dans le cirque de Salazie ! Pour pas longtemps, mais au moins on y sera passĂ©. Il y a une descente de quelques centaines de mĂštres avant d’arriver au prochain ravito, je me rends compte qu’en plus du genou j’ai trĂšs trĂšs mal aux pieds
 Bizarre. Il faut encore que je change de chaussettes ? J’ai l’impression d’avoir mis de la crĂšme il n’y a pas si longtemps. Elle file devant, je suis ralenti dans la descente. Je la rattraperai dans la montĂ©e du au ravitaillement de la Plaine des merles. Pas de chrono ici. Le pointage se trouve Ă  3 km d’ici au fameux sentier scout. Énorme coup de barre. Si mes souvenirs sont bons il est 23h15 Ă  ce moment lĂ . Ça fait donc plus de 25h que je suis en course et j’ai passĂ© la moitiĂ© ! Youpi. Je demande Ă  un bĂ©nĂ©vole s’il est possible de s’allonger sur les lits de camps dans la tente, il m’explique que les lits sont pour les blessĂ©s. Ambiance seconde guerre mondiale Ă  Plaine de merles. Bon je comprendrai que c’est le cas sur tous les ravitaillements et c’est bien normal dans la plupart des cas. Il me dit “T’es cassĂ© lĂ , va t’allonger juste devant la tente je viendrais te rĂ©veiller dans 15 min.”Avant ça, j’en profite pour me remettre de la crĂšme sur les pieds mais ça ne me soulage pas. Tiens donc. Je sors la couverture de survie de mon sac et rĂ©ussi ma premiĂšre micro sieste de 15 minutes Ă  mĂȘme le sol en plein milieu des arbres Ă  cĂŽtĂ© d’autres coureur. Il doit y avoir des araignĂ©es de l’espace ici... 23h30, je me rĂ©veille naturellement. C’est dingue comme le cerveau est programmable. En me rĂ©veillant, j’aperçois le bĂ©nĂ©vole Ă  l’autre bout du ravitaillement. Je pense qu’il m’avait complĂštement oubliĂ©. Heureusement que je me suis rĂ©veillĂ© tout seul ... J’avais mis 5 rĂ©veils et le portable collĂ© Ă  l’oreille de toute façon, pas folle la seul problĂšme c’est que je suis littĂ©ralement frigorifiĂ©. Tout a refroidi, les muscles, les pieds, la tendinite. Il fait trĂšs froid et humide dans Mafate. Mon corps m’envoie des signaux et semble me dire “euh
 tu te foutrais pas un peu de ma gueule lĂ  ? Allez c’est bon je me casse, dĂ©merde toi. Non non je ne te rĂ©chauffe pas dĂ©merde toi enfoirĂ©. Ah tu as mal ? TIENS ! AIE”. J’essaie de me rĂ©chauffer, je vais boire un thĂ© au ravitaillement mais il faut que je reparte trĂšs vite. Chaque pas est atrocement douloureux. Je n’arriverais mĂȘme pas Ă  dĂ©crire cette douleur. Les pieds brĂ»lent Ă  chaque frottement avec la chaussure, les chevilles ont Ă©tĂ© mis Ă  rude Ă©preuves et, Ă  froid, envoient une douleur similaire Ă  celle que l’on pourrait avoir quand on marche avec une entorse. La tendinite a refroidi et est Ă  vif. Seuls mes muscles semblent bien tenir la baraque. J’enroule ma couverture autour de moi et j’avance tel un blessĂ© de guerre
 Que c’est compliquĂ© de repartir. Je suis dans le gaz complet. J’avance comme je peux et arrive Ă  Sentier Scout, 45 min plus SCOUT — 89 KM 5167 D+Depuis Marla 9,9 km / 595 d+Temps de course 264035Bon j’ai du mal Ă  croire que j’ai mis 4h pour faire cette partie de 10 km. Qu’est-ce que j’ai foutu putain ? M’arrĂȘter m’a fait perdre du temps.“Combien de kilomĂštres monsieur ?” - J’ai 94 Ă  la montre, c’est fou ça quand km de diffĂ©rence avec le parcours officiel, je veux bien avoir trainĂ© des jambes sur 1 ou 2 ravito, ce qui aurait pu gratter 1 km, mais quand mĂȘme 
 il faut que je prenne cette donnĂ©e en compte maintenant. J’ai pu me rĂ©chauffer heureusement. J’ai beaucoup pensĂ© Ă  l’histoire de Mathieu Dossard 263 que j’ai rencontrĂ© avant le dĂ©part, et son abandon pour cause d’hypothermie. Je me rends compte que j’ai fait exactement la mĂȘme erreur, presque au mĂȘme endroit et que ça aurait pu me coĂ»ter la course. MalgrĂ© cela, dormir 15 minutes m’a fait du bien, je sens que ça m’a reposĂ© l’esprit. J’ai gardĂ© ma couverture de survie en la coinçant entre mon sac et ma hanche au cas oĂč j’en aurais encore besoin dans la Scout, je l’imaginais comme un petit sentier bien sympa qui descend pendant 10 km, sans difficultĂ© majeur. Bon il n’est pas bien compliquĂ© au final, mais il n’est pas non plus trĂšs roulant. Mes Ă©couteurs me lĂąchent
 Oh non. Je vais passer la nuit sans
 Tant pis, dont je me souviens surtout, c’est que nous sommes dans le noir le plus complet, que je suis Ă©clairĂ© par ma frontale et que j’avance dans des endroits avec le vide Ă  50 cm de moi. Ça doit ĂȘtre magnifique de jour
 Je reconnais une crĂȘte que j’ai vu dans les vidĂ©os de zinzin Denis Clair que je traverse de nuit. De chaque cĂŽtĂ© il y a environ 400 mĂštres de vide. Dans le noir on imagine la grandeur du paysage et on se sent ce moment prĂ©cis je me suis arrĂȘtĂ© une nouvelle fois pour Ă©teindre ma frontale. Je suis au beau milieu de nulle part en pleine, sur une Ăźle perdue dans l’ocĂ©an Indien. Sur cette crĂȘte, de part et d’autre le vide, il n’y a ni bruit, ni lumiĂšre, ni pollution, loin de Paris. Rien. Je vous laisse imaginer Ă  quoi peut ressembler le ciel dans ces conditions. Par la suite, je me rappelle avoir traversĂ© de nombreuses ravines maintenant que vous savez ce que c’est, des descentes raides puis des montĂ©es sur le versan d’en face avec des marches Ă  n’en plus finir. C’est assez casse patte mais j’avais anticipĂ© ces moments. Les sentiers se font de plus en plus Ă©troits dans les montĂ©es, Ă  tel point qu’il y a parfois des cordes sur les cĂŽtĂ©s pour se tenir et Ă©viter tout risque de chute. J’évite de trop faire le malin pour ne pas tomber dans le ça de nuit. Extrait de souffre de plus en plus. Autant les douleurs au psoas et au bassin ont totalement disparu, autant la douleur de la tendinite s’intensifie petit Ă  petit. Pareil pour celle de mes pieds
 Ça devient insupportable. Chaque pas que je fais fait frotter mes orteils contre ma semelle et produit une douleur horrible. Comme si on vous frottait du papier ponce contre la peau pendant des heures et des heures. C’est indescriptible. Et comme vous pouvez le voir sur le profil de course, dans Mafate on descend pendant des kilomĂštres pour arriver au fin fond. Et il faut voir Ă  quoi ressemblent ces descentes
 Des lacets, des marches de roche de 50 cm, des racines Ă  perte de vue. En passant je vois Ă©normĂ©ment de coureurs qui sont arrĂȘtĂ©s sur le bord, enroulĂ©s dans leur couverture de souffre le martyr, obligĂ© de m’arrĂȘter encore dans la descente pour remettre de la crĂšme NOK sur mes pieds, dont je commence Ă  manquer. L’endroit est trĂšs beau, Je m’assois sur ma couverture de survie et en profite pour manger une barre. Tout est silencieux autour. Nous sommes sur un chemin en terre bordĂ© par des arbres que je reconnais malgrĂ© la de ne doit pas ĂȘtre trĂšs loin du prochain ravitaillement “Ilet Ă  Bourse” au km enlevant ma chaussure, je constate que la situation est plus grave que prĂ©vue. Mes pieds font une rĂ©action Ă  la matiĂšre de mes semelles orthopĂ©diques
 Ils ont gonflĂ© avec le frottement ce qui explique la douleur que je ressens et les ampoules qui se forment sur les bords mon pieds. DeuxiĂšme grosse erreur. J’ai oubliĂ© les semelles d’origine Ă  Paris. J’avais prĂ©vu de les prendre mais en prĂ©parant ma valise elles sont restĂ©es dans la boite. Je me suis rendu compte au moment oĂč je prĂ©parais mon sac le matin du dĂ©part
 Le frottement en dessous de mes orteils est insupportable, mais ce sont les 2 gros qui sont les plus douloureux. J’attrape 2 compeed dans mon sac que j’enroule autour, peut-ĂȘtre que ça attĂ©nuera les frottements... Je rĂȘve de plonger mes 2 pieds dans une bassine d’eau glacĂ©e
 Cette image parait si lointaine mais c’est ce dont j’ai besoin lĂ  maintenant. Au moins quelques minutes, juste pour qu’ils repars, en boitant. Ça descend encore et toujours. ArrivĂ© en bas nous traversons un petit pont qui bouge Ă©normĂ©ment au dessus de la riviĂšre, et nous remontons aussi sec !Toujours de nuit. Extrait de crois que nous enchaĂźnons encore 2–3 ravines avant de grimper une ultime fois. Le ravitaillement n’est plus trĂšs me rends compte que j’ai mes premiĂšres hallucinations. Je n’ai pas vu de bateau gĂ©ant, ni d’élĂ©phant rose comme certains. Juste un phĂ©nomĂšne Ă©trange qui transforme toutes les tĂąches prĂ©sentes sur les troncs d’arbres et les roches que je croise en visages / petits dessins / bonhommes. Je suis fascinĂ© par la vitesse Ă  laquelle mon cerveau perçoit et crĂ©e simultanĂ©ment dans cet Ă©tat. J’imagine que c’est la fatigue visuelle qui provoque ça mais je trouve que c’est hyper pratique pour la crĂ©ativitĂ©. Bon si ça se trouve ce sont vraiment des petits dessins qui sont dessinĂ©s mais je doute qu’au find fond de Mafate, des randonneurs se soient amusĂ©s Ă  pimper tous les cailloux. J’arrive trĂšs vite au ravitaillement d’Ilet Ă  Bourse, au km À BOURSE — 97 KM 5447 D+Depuis Sentier Scout 7,8 km / 280 d+Temps de course 292841“Bonsoir, il y a des infirmiers ?” - Non prochain ravito, au 100Ăšme, Ă  45 minutes d’ici. - Et merde, merci !J’ai 1h45 d’avance sur la barriĂšre horaire. Je remplis une seule gourde, mange un quartier d’orange et file dans la foulĂ©e. Je ne peux plus supporter la douleur qui me prend les nerfs, je subis rĂ©ellement la situation. Je n’ai qu’une hĂąte, que l’on me soigne et que l’on me trouve une solution pour y remĂ©dier. Ma course est complĂštement remise en question si je dois encore subir 30h dans cet Ă©tat. La portion qui suit est du chemin de forĂȘt, ça monte pendant 1 km histoire de se manger une petite ravine ensuite. Et Ă©videmment ça descend sur un single pendant 2 km pour arriver presque tout en bas de Mafate. Je dis bien presque
 La particularitĂ© de cette portion est qu’il doit y avoir une riviĂšre pas trĂšs loin, je me souviens entendre un bruit sourd dans la nuit, le croassement des crapauds. Ils sont bien Ă©nervĂ©s les crapauds PLACE — 100 KM 5573 D+Depuis Ilet Ă  Bourse 3,2 km / 126d+Temps de course 302912100 BORNES. Et oui, j’ai mis 1 heure pour faire les 3 km. Descente = combo frottement sous les pieds + appui sur le tendon douloureux. Ai-je encore prĂ©cisĂ© que je n’avance plus en descente ?Il est 4h30 du matin de la deuxiĂšme nuit, j’arrive Ă  Grand Place, point clĂ© de la course. Je file tout de suite au “poste de secours” oĂč je tombe sur deux jeunes infirmiĂšres que j’appellerai TIC & TAC pour les besoins de l’histoire.“Bonsoir Tic & Tac, j’ai besoin de me faire soigner”Tic Bonsoir, assieds toi. Que se passe-t-il ? Moi Je souffre terriblement d’échauffements sous les pieds et sous les orteils, je ne supporte plus la matiĂšre de mes semelles”. Tac Ah, nous on n’est pas podologue dĂ©solĂ© on ne peut rien Je sais, mais pouvez-vous essayer de faire quelque chose pour les semelles svp ? Mettre de la crĂšme dessus, du sparadrap, de l’élasto, de la glace, n’importe quoi. Regardez l’état des mes pieds
Tic Non dĂ©solĂ© on est pas habilitĂ© pour ça. Moi HabilitĂ© pour quoi ? Tac Pour mettre du sparadrap sur une semelle. Il faut que tu voies Ă  Sans Souci au 125Ăšme km, il y aura des podologues. Moi Il faut ĂȘtre habilitĂ© pour ça ? SĂ©rieusement les podologues sont Ă  25 km, avec 2000 de dĂ©nivelĂ© positif et nĂ©gatif. C’est la partie la plus difficile de la course
 Vous ne pouvez
Bon filez moi des ciseaux svp, je vais le m’exĂ©cute. Je coupe un bout d’élasto que trouve dans mon sac et le colle au niveau des orteils. Je mets de la crĂšme par dessus. Je veux bien que ce soit du bĂ©nĂ©volat, mais il y a certains bĂ©nĂ©voles semblent dĂ©couvrir ce qu’est le Grand Raid. Heureusement ce n’est qu’une infime minoritĂ©. Tout ceux que j’ai croisĂ©s Ă  Cilaos, Sans Souci ou Ă  certains ravito Ă©taient au top, prĂȘt Ă  se dĂ©mener pour toi pour remplir tes gourdes, te soigner etc. Mais d’autres franchement 
 Dans la minute qui suit, un homme arrive extĂ©nuĂ©. Il demande Ă  s’allonger 10 minutes sur les lits de camps car il n’en peut plus. Il y en a une dizaine de dispo. Elles refusent, les lits sont pour les blessĂ©s. C’est limite je trouve. Le mec est Ă  bout de force, personne n’utilise les lits. Si 10 blessĂ©s arrivent il s’en ira, mais de lĂ  Ă  refuser catĂ©goriquement
En bouclant mon sac, et pour conclure ce malencontreux Ă©pisode, Tic s’adresse Ă  Tac Tu peux aller me chercher un snickers stp ? J’en peux plus lĂ . NoisetteAddictJe vais m’alimenter au ravito et repars pour 13 kilomĂštres trĂšs, trĂšs compliquĂ©s. On va se prendre successivement 200 d+ sur 1,5 km400 d- sur 1,5 km 150 d+ sur 1 km 150 d- sur 1 km 650 d+sur 3 km1000 d+ sur 5 kmJe fais le malin avec mes beaux chiffres lĂ  mais je n’en avais aucune idĂ©e pendant la course. Tout ce que je savais, c’est qu’il fallait aller en haut du MaĂŻdo Ă  112–113 km et qu’il y avait une ascension de dingue Ă  ce moment lĂ . Bon visiblement ça part de plus loin que prĂ©vu et surtout, il y a des descentes dans les ascensions. A bientĂŽt Tic & Tac !J’attaque le premier morceau. Au loin sur le versan opposĂ© j’aperçois les frontales des coureurs qui arrivent au col du MaĂŻdo
 C’est si loin et si haut ! Je continue mon ascension sans perdre espoir, ça monte trĂšs trĂšs sec mais j’avance bien pendant que le soleil pointe le bout de son nez. Il fait jour lorsque j’arrive en haut de la premiĂšre montĂ©e. FIN DE LA DEUXIÈME NUIT !On doit monter tout en haut en face. Extrait de peine arrivĂ© en haut, il faut redescendre tout en bas. Comme d’hab
 VoilĂ  toute la spĂ©cificitĂ© de cette course, pour monter en haut d’un col il faut d’abord monter, puis descendre, puis monter plus haut, puis redescendre plus bas et finalement monter. Gros, gros coup dur. On se lance dans un mur verticale de 400 mĂštres de dĂ©nivelĂ© en un peu plus d’1 km. C’est la descente la plus dangereuse de la descend jusqu’en basJe suis lent
 Je ralenti des gens et ça m’agace mais je souffre terriblement. Les passages dans lesquels on passe sont complĂštement dingues. On a mĂȘme le droit de descendre un ruisseau quasiment vertical, ça glisse et c’est super dangereux. J’arrive en bas sur les rotules. J’ai un coup de fatigue Ă©norme et je perds en luciditĂ©. Nous sommes au bord de la riviĂšre de galets Ă  Roche AncrĂ©e, au point le plus bas de Mafate. Maintenant l’objectif c’est d’arriver au point le plus haut et d’en est tout en bas. Extrait de ce sera le moment le plus dur de ma course. La fatigue mentale prend le dessus et je suis au bord du craquage. Nous sommes entourĂ©s de montagnes immense, des murs extrĂȘmement raides. C’est hyper oppressant et pour en sortir, nul autre choix que de monter. Je regarde mon tĂ©lĂ©phone il doit ĂȘtre 6h30 du matin je crois. Dans un Ă©lan de luciditĂ©, je dĂ©cide de m’allonger sur une bĂąche au bord de cette riviĂšre et demande au bĂ©nĂ©vole de me rĂ©veiller. 10 minutes plus tard je me rĂ©veille encore naturellement, en profite pour me remettre de la crĂšme sur les pieds, manger une barre et reprendre un doliprane. La sieste m’a fait le plus grand bien et je repars Ă  m’apprĂȘte Ă  attaquer les 5 km et 800 d+ pour monter Ă  Roche Plate. On m’annonce 2 heures d’ascension environ, je pense mettre moins. Au TaĂŻbit c’est presque le temps que j’ai mis pour monter et redescendre Ă  Marla. Je pars trĂšs vite, je double beaucoup de personnes je lance des “allez courage” Ă  tous ceux que je croise, mais au bout d’1 km, ça redescend aussi sec. Il commence Ă  pleuvoir. Je deviens fou
 Nous redescendons presque aussi bas Ă  une nouvelle ça remonte aussi sec. Si mes souvenirs sont bons, il reste une seule ravine Ă  descendre dans l’ascension puis que de la montĂ©e jusqu’à roche de croisons des personnes qui descendent. Je mettrai un peu moins de 2 heures pour arriver au ravitaillement de Roche Plate. Comme quoi les ascensions avec des descentes cachĂ©es ce n’est pas mon truc 
ÉCOLE ROCHE PLATE — 108,5 KM 6519 D+Depuis Grand Place 8,5 km / 946 d+Temps de course 345026108–109 km au compteur environ, presque 35h de course. Il est 8h50 du matin. Il fait trĂšs beau et commence Ă  faire est peu commun. Nous sommes en plein milieu de Mafate coincĂ©s dans la montagne, dans une Ă©cole. Il n’y a aucune route Ă  proximitĂ©, simplement des montagnes et des cassures Ă  perte de vue. C’est incroyable. Les gens qui vivent ici doivent tellement avoir une vie diffĂ©rente de la notre
Extrait de me pose quelques minutes, en profite pour bien faire le plein de sucre et de sel. J’ai des larmes qui coulent et je ne me rends Ă  peine compte. Je relis la causerie d’avant match de Nicolas sur mon tĂ©lĂ©phone. Je sais ce qui m’attends, le MaĂŻdo, un mur vertical qui se dresse tout droit devant nous. Je ne rigole pas, c’est vertical vu d’en MaĂŻdo. Extrait de Djodei wall de Games of Thrones c’est rien Ă  cĂŽtĂ© 
Je perds du temps au ravito, encore obligĂ© d’enlever les chaussures pour mettre de la crĂšme, remettre du baume du tigre sur le tendon. Je rĂȘve de rĂ©gler ce problĂšme de semelle, mais rien n’y fera. Jusqu’au bout du bout, je devrai les je repars de Roche Plate. Je retire ma veste, il fait trop chaud. On doit monter 2 km pour arriver Ă  “La BrĂšche” et ensuite ce sera 4 km verticaux. Je recharge une nouvelle fois ma du mal sur les 2 km, j’ai probablement mangĂ© trop vite au ravito. Du classique, des marches en pierre, des racines Ă  escalader. Rien de trĂšs Ă©tonnant. ArrivĂ© Ă  la brĂšche le bĂ©nĂ©vole me dit qu’il faut 2h pour atteindre le sommet. Je lui dis que je mettrai moins. Pari tenu !Vu depuis la brĂšche, La riviĂšre oĂč nous Ă©tions quelques km plus parti pour LA grosse ascension de cette diagonale des fous, celle que je redoutais depuis des semaines. Celle dont tout le monde parle. Contrairement au TaĂŻbit qui est essentiellement composĂ© de marches, le MaĂŻdo c’est le bor-del. Allez Thibault c’est ton moment. J’active le mode Blaise Matuidi et je pars en trĂšs raid, trĂšs trĂšs accidentĂ©. On escalade des blocs de pierre, on ne fait jamais le mĂȘme pas, ça glisse, ça roule. Il n’y a rien qui va dans cette ascension !Extrait de que c’est bon d’avoir retrouvĂ© les jambes et la tĂȘte. Il se met Ă  pleuvoir et il fait en mĂȘme temps une chaleur toute la premiĂšre partie 2 km, j’accroche des petits groupes pendant quelques lacets, on s’encourage et je passe devant. C’est vrai l’ascension est trĂšs longue et Ă©puisante psychologiquement. Ça me rappelle la descente de l’enfer pour aller Ă  Cilaos mais dans l’autre sens. On monte, on monte mais on n’a l’impression que la crĂȘte est toujours aussi Ă©loignĂ©e. Il faut imaginer monter 4 km et oĂč chaque pas tire sur les cuisses et est compliquĂ© Ă  fais la seconde moitiĂ© de l’ascension avec un local, sans dossard, qui accompagne un de ses amis. Il a de l’esprit, on rigole beaucoup. Nous finissons l’ascension tous les 2 Ă  un bon mur vu d’en hautMaman inquiĂšte pour son fils !Je mets environ 1h20 Ă  atteindre le sommet depuis la brĂšche ce qui est vraiment correct, Ă  mon niveau encore une fois. Il est 11h30. Tel le dragon aux yeux bleux, je viens de fracasser le MaĂŻdo. Comme pour son petit frĂšre le TaĂŻbit, je ne lui ai laissĂ© aucune haut mes parents m’attendent avec Patrick & Laura. Passer le sommet du MaĂŻdo c’est un grand moment. Il y a vraiment du monde lĂ  haut et trĂšs grosse ambiance dĂšs que l’on arrive au sommet. On nous encourage “BRAVO THIBAULT” ça redonne des forces et le sourire pour la suite ! Apparement j’ai une trĂšs bonne tĂȘte, ça les m’assois sur un coin d’herbe avec ma super Ă©quipe d’assistance changement de t-shirt, recharge du sac en barres, retrait des chaussures, bombe de froid, nouveau tube de crĂšme, nouveaux Ă©couteurs. Ma mĂšre me tend mĂȘme un Kinder Bueno ! Ça fait si longtemps que je n’en ai pas mangé  Je le surtout je rĂ©cupĂšre enfin ma genouillĂšre que j’attends depuis 16 heures. En l’enfilant, je me rend compte que c’est dĂ©jĂ  trop tard. Le tendon est trop inflammĂ© et trop gonflĂ© pour que je puisse la supporter. Tant pis, il faudra faire sans
 J’ai quand mĂȘme parcouru 1 km avec et eu le temps de me faire flasher par les photographes !On m’annonce que le pointage et ravitaillement de MaĂŻdo se situe Ă  2 km du sommet sur la crĂȘte. Je quitte ma super assistance et repars avec mon pĂšre qui me propose de m’accompagner sur la prochaine TÊTE DURE — 115,5 KM 7598 D+Depuis Roche Plate 7 km / 1079 d+Temps de course 383126MaĂŻdo TĂȘte Dure, 12h30. J’ai traĂźnĂ© lĂ  haut avant d’arriver au pointage et au ravito. Je ne reste que quelques minutes, je me tĂąte Ă  me faire strapper le genou mais je prĂ©fĂšre attendre les kinĂ©s de Sans Souci. Au programme, une descente de 14 km avec 1600 de dĂ©nivelĂ© nĂ©gatif, rien que ça. Avec l’état de mes pieds et de mes genoux je suis trĂšs quelques kilomĂštres, nous marchons sur la crĂȘte du MaĂŻdo en alternant petites montĂ©es et descentes sur terrain accidentĂ©. Mon pĂšre comprend que ce n’est pas une petite ballade la diagonale !Surtout, je ne vois pas le dĂ©nivelĂ© nĂ©gatif Ă©voluer. Je trouve ça Ă©trange. Finalement ce sont les 10 derniers km qui vont ĂȘtre difficiles
 Plus je marche et plus je souffre. C’est au tour de mon genou droit, l’autre en l’occurence, de devenir douloureux. La bandelette ilio-tibiale commence Ă  siffler sĂ©vĂšrement Ă  force de descendre. Mes pieds brĂ»lent, ma tendinite s’intensifie. C’est la m**de, je suis en train de perdre l’intĂ©gralitĂ© de mon moyen de transport. Et ça descend, des marches, des chemins. C’est interminable. La pluie s’invite, Ă©videmment. J’ai besoin de me faire soigner les pieds et les genoux, ça mettons plus de 4h pour atteindre Sans Souci. Interminable. Je me suis fait doubler toute la descente, ça me rend fou. J’avais doublĂ© tant de monde depuis Roche Plate. Cette descente que je pensais ĂȘtre un moment de rĂ©pit dans lequel je pourrais courir et envoyer s’est avĂ©rĂ©e ĂȘtre un cauchemar. Pas difficile en soi, pas technique mais mon Ă©tat physique l’a rendue compliquĂ©e Ă  gĂ©rer. Dans la descente, nous croisons des gens Ă  qui je demande systĂ©matiquement “combien de temps Sans Souci”. Et d’une personne Ă  l’autre on se retrouve avec “20 minutes”, “1 heure”, “40 minutes”. Si vous voulez un conseil, ne demandez pas, jamais. J’ai fait l’erreur jusqu’à l’arrivĂ©e et on se fait du mal SOUCI — 128,6 KM 7665 D+Depuis MaĂŻdo tĂȘte dure 13,1 km / 67 d+ / 1600 d-Temps de course 42462416h30, nous arrivons Ă  Sans Souci oĂč je retrouve mes parents Patrick & Laura. Ça fait 128,6 km et nous avons enfin quittĂ© la montagne
 Sans Souci c’est la deuxiĂšme base de vie. Et qui dit base de vie dit attirail complet de soigneurs mĂ©decins etc. Je file m’inscrire sur la longue liste d’attente pour le podologue et le kinĂ© et en profite pour aller manger un repas chaud. Du rougail saucisse avec du riz et des reste encore 40 kilomĂštres avec 2000 d+ / d-. Sur le papier ça va, le plus gros est fait, mais aprĂšs 42h de course, 128 bornes et quasiment 8000 mĂštres de dĂ©nivelĂ©, ça tire un peu. Surtout, je vais devoir faire une 3Ăšme nuit blanche consĂ©cutive. Mais je ne suis pas du tout abattu au contraire, j’ai cette premiĂšre impression que plus rien ne m’empĂȘchera d’aller au bout. Peut-ĂȘtre parce que j’ai un peu nĂ©gligĂ© la prĂ©paration de cette partie et que je n’en connais pas bien le dĂ©tail. En mĂȘme temps on a quittĂ© la montagne et on ne peut s’empĂȘcher de penser que le plus dur est fait !J’avale mon repas en 5 minutes, je n’ai pas du tout envie de rater mon tour au podologue. Je vais attendre sous la tente, il y a Ă©normĂ©ment de monde. Une personne gĂšre le flux mais elle passe beaucoup de temps Ă  appeler des numĂ©ros de dossards qui de toute Ă©vidence ne sont plus lĂ . On nous demande de plonger nos pieds dans une bassine d’eau pour les laver. WOOOOOOOAW. Ça fait du bien. J’attends presque 45 minutes avant d’ĂȘtre pris en charge par 2 podologues, une par pied. Et la suite n’est pas jolie jolie
 Elles sortent des seringues et commencent Ă  percer les ampoules une par une en injectant du dĂ©sinfectant dedans. Ça pique mais c’est pour la bonne cause ! Elles trouvent mĂȘme une ampoule sous un ongle, belle perf Thibault. Je vous Ă©pargne la photo maintenant mais vous l’aurez Ă  l’arrivĂ©e ne vous inquiĂ©tez leur explique mon problĂšme de semelles et d’échauffement sous les pieds mais elles m’expliquent qu’à part enduire le pied et la chaussette de crĂšme, elles ne pourront rien faire de plus. Je leur montre fiĂšrement ma semelle que j’ai moi mĂȘme strappĂ©, cela les fait beaucoup rire. Elles trouvent cela ingĂ©nieux bien que pas forcĂ©ment trĂšs judicieux pour le frottement que cela peut provoquer. Franchement ça m’a plutĂŽt rendu service. Elles arrachent les bandages de la CELLOPHANE PUTAIN. En Ă©crivant ces lignes quelques jours plus tard, je me demande si recouvrir ma semelle de cellophane n’aurait pas Ă©tĂ© LA solution. Je fois toutes les ampoules traitĂ©es, elles appliquent un bandage pour Ă©viter que cela s’infecte et appliquent la stratĂ©gie de lubrification maximale du pied et de la chaussette avant de remettre ma chaussure. AĂŻe, ça pique sĂ©vĂšre. J’enchaĂźne avec les kinĂ©s, je demande 2 strappings, 1 au genou gauche pour limiter la rotation externe et prĂ©server la tendinite au maximum, 1 au genou droit pour le tenseur fascia 2 bĂ©nĂ©voles s’y mettent et utilisent tout un rouleau d’Elastoplast. Au moins ça ne va pas bouger. Je trouve ça gĂ©nial, que ce soit pour les podologues oĂč les kinĂ©s, les binĂŽmes-bĂ©nĂ©voles sont composĂ©s d’un jeune expĂ©rimentĂ© et d’une Ă©tudiante. Donc nous sommes de parfaits cobayes pour qu’ils puissent s’exercer, tout le monde y gagne. Je passerai presque 30 minutes sur les tables. En ressortant du ravitaillement, j’essaie de faire une sieste Ă  mĂȘme le sol sur les graviers la tĂȘte posĂ©e sur le c’est la rĂ©crĂ© Ă  Sans Souci. Il fait jour, il y a de la musique, du bruit. Avant de partir mon pĂšre est au tĂ©lĂ©phone avec ma soeur, je lui demande “Si je finis, tu me payes des Airpods ?” Ça fait des mois que je lance cette phrase dans plein de situations diffĂ©rentes. Elle rĂ©pond “Allez ok “. WOW ! J’ai plus le choix perdu beaucoup de temps Ă  Sans Souci Ă  attendre les soigneurs mais au moins je suis plus ou moins neuf pour avaler les 40 derniers km. Rien que ça. En partant, Patrick me propose de m’accompagner sur les 15 prochains km, jusqu’à la Possession. Je sais qu’il adore ça et que ça lui fait plaisir. J’avale de nouveau un doliprane point prĂ©vention, ne jamais abuser du doliprane en course, trĂšs mauvais pour le foie. Pas plus de 4 toutes les 24h, et minimum 4 heures d’écart entre chaque. J’en aurai pris 5 en tout dans la 18h30, nous partons dans les rues de Sans Souci, je suis restĂ© 1h45 au total. Je joue avec le feu en partant avec 1 heure sur les barriĂšres, mĂȘme si je sais que je vais regagner du temps sur la prochaine. Il fait trĂšs lourd, et le soleil se couche trĂšs rapidement. DÉBUT DE LA TROISIÈME ET DERNIÈRE NUIT ! Prochain ravitaillement Ă  10 km et 600 d+ de profitons d’un kilomĂštre sur les routes bĂ©tonnĂ©es, que c’est agrĂ©able de poser ses pieds Ă  plat
 ça faisait trĂšs longtemps. Puis nous attaquons un descente technique pour arriver au niveau de la riviĂšre de galet oĂč nous entendons de nouveau des crapauds. Ça fait un bruit sourd ! Nous la longeons sur 1 km, une portion plate et ultra roulante ! Rien ne m’arrĂȘtera maintenant. J’ai vu sur les vidĂ©os que nous devions traverser cette riviĂšre qui est plutĂŽt remplie cette de galets, extrait de cela, il y a une rangĂ©e de petites pierres glissantes qui s’étale sur une cinquantaine de mĂštres. Je veux Ă  tout prix Ă©viter de mettre le pieds dans l’eau pour ne pas infecter les plaies Ă  vif et dĂ©coller le bandage que m’ont soigneusement posĂ© les podologues. Il y a une sorte de passeur qui nous aide Ă  traverser, je me tiens Ă  lui car c’est hyper casse gueule. Puis nous nous engageons sur une montĂ©e dans la poussiĂšre et les herbes sĂšches. Nous marchons dans le sens opposĂ© de l’autre cĂŽtĂ© de la riviĂšre, nous avons un trĂšs bon rythme. Je suis frais comme un gardon. Sur notre chemin, nous croisons un homme complĂštement pliĂ© en 2, il vient de se faire un lumbago. Outch
 Ça va ĂȘtre compliquĂ© de terminer les 40 km restants. Nous lui donnons un doliprane et lui souhaitons bonne chance, il nous explique qu’il n’abandonnera pas tant qu’il ne sera pas au sol. Bon ne sais pas s’il est arrivĂ© au bout, mais les portions suivantes n’ont dĂ» lui laisser guerre de chance. Nous retrouvons une partie de route. Il y a beaucoup de gens dehors avec de la musique, des ravitos sauvages. C’est trĂšs populaire dans ce quartier. Les gens sont hyper gentils et encourageants. Nous nous engageons sur un chemin montant sur 3–4 km, mon terrain de prĂ©dilection. Je double une trentaine de personnes
 ArrivĂ© en haut, pointage manuel, et nous redescendons sur un chemin parallĂšle pendant 2 km pour arriver au ravitaillement. Je comprends que le pointage manuel permet de s’assurer que des petits malins qui connaissent le coin ne coupent pas la montĂ©e. Bon visiblement descendre un chemin un tout petit peu inclinĂ© sans aucune difficultĂ© est toujours aussi douloureux, je me refais doubler successivement. Ça me rend d’arriver au ravitaillement, je me souviens de Nathalie Mauclair qui, quelques mois auparavant, me disait au tĂ©lĂ©phone “fais attention au chemin Ratinaud et chemin Kala, c’est un moment que je dĂ©teste”. Nous sommes dessus et je comprends trĂšs vite pourquoi. Le chemin Ratinaud, il faut l’imaginer comme une pente ultra raide dans la forĂȘt avec des espĂšces de gros rochers posĂ©s dessus. Il n’y a rien pour se tenir si ce n’est des lianes et des arbres sur les cĂŽtĂ©s. C’est Ă©prouvant. Heureusement ça ne dure qu’un kilomĂštre que je ferai en 25 minutes tout de mĂȘme, juste avant de rejoindre une route bĂ©tonnĂ©e qui nous emmĂšne au RATINAUD — 138,6 KM 8265 D+Depuis Sans Souci 10 km / 600 d+Temps de course 474544La ravito est en bord de route et l’ambiance est super ici. Musique Ă  fond, barbecue. Je prends mĂȘme une petite merguez sur la route, pensant en avoir fini avec le chemin Ratinaud / Kala. Petit sentiment de devoir accompli, loin de me douter de ce qui m’ vĂ©ritĂ©, le calvaire ne fait que commencer. Chemin Kala veut dire chemin de galets si mes souvenirs sont bons. En descente. AĂŻe. Ce que je croyais derriĂšre est en fait devant moi. Et il fait une chaleur Ă©touffante, je transpire en peine reparti du ravitaillement que l’on se mange une descente hyper technique verticale sur quelques dizaines de mĂštres, et une montĂ©e aussi raide dans la foulĂ©e. Il faut carrĂ©ment escalader avec les mains pour grimper
 Et nous enchaĂźnerons cela pendant 2 kilomĂštres, du chemin “Koh Lanta” avec des lianes des rochers, des Ă©chelles en bambou Ă  monter et descendre. C’est l’enfer. Je ne mettrai aucune photo de cette partie. Je vous laisse le soin de l’ semble se calmer au bout d’un chemin qui monte dans les galets pendant 3 kilomĂštres. Et qui dit chemin qui monte dit qu’il va falloir redescendre derriĂšre. Et merde. Mettre mes pieds sur ces Ă©normes galets me rappelle les pubs de rasoirs Ă  la tĂ©lĂ©. Vous savez quand ils mettent des plans dĂ©monstration de leur flexibilitĂ©. La lame est testĂ©e sur des surface sphĂ©rique et cherche Ă  se poser Ă  plat. LĂ  c’est pareil, la semelle cherche Ă  se poser Ă  plat coĂ»te que coĂ»te ce qui fait frotter le pied Ă  l’intĂ©rieur de la chaussure et crĂ©er des ampoules de l’espace. Pendant des heures. arrive la descente tant redoutĂ©e dans laquelle je deviens fou une nouvelle fois. Je suis rejoint par une demoiselle un poil trop en forme pour moi qui n’arrĂȘte pas de parler pour “rester Ă©veillĂ©e”. Mais quand je dis parler, c’est parler parler parler. Les questions + les rĂ©ponses. D’habitude j’aurais trouvĂ© ça marrant, mais lĂ  je suis Ă  bout de nerf, je la laisse passer devant moi
 C’est peut ĂȘtre une strat’ pour remonter des places. Diablement fais encore l’erreur de demander Ă  ceux que je croise Ă  combien de temps se trouve le ravitaillement et lĂ  j’ai de tout. 500 m, 3 km, 1 km. Ça rend complĂštement fou. On nous avait annoncĂ© 7 km entre les 2 ravitaillements, je suis Ă  plus de 10 Ă  la montre. J’arrive trĂšs Ă©nervĂ© et Ă©puisĂ© Ă  l’école Possession. C’est un signe de fatigue. Je fais le point sur le kilomĂ©trage, il en reste une vingtaine parmi lesquels le chemin des anglais, une grosse ascension et une derniĂšre descente technique
 Ça fait plus de 51 heures d’effort que l’on est parti, 60 que je n’ai pas dormi. Je ne me sens pas particuliĂšrement mal mais j’ai peur que mon corps s’arrĂȘte Ă  tout instant oĂč de me blesser dans les derniers kilomĂštres ce qui serait terrible. Je prends la dĂ©cision de faire une vraie sieste Ă  la POSSESSION— 146,7 KM 8265 D+Depuis Chemin Ratinaud 8,1 km franchement au moins 10 / 126 d+Temps de course 510505Il est 1h05 du matin, 147Ăšme kilomĂštre et je suis hyper Ă©nervĂ© par le chemin que l’on vient de parcourir et tous ces gens qui m’annoncent “15 minutes pour le ravito” depuis prĂšs d’une heure. Laura m’a fait la surprise de venir avec mon pĂšre ! Ils se sont inquiĂ©tĂ©s car nous avons mis plus de temps que prĂ©vu. Je file dans le ravito dĂšs mon arrivĂ©e pour remplir mes gourdes et m’alimenter. Je n’ai qu’une hĂąte, en sortir pour allez faire une demande Ă  Laura de me rĂ©veiller Ă  2h00, soit 45 minutes plus tard. J’en profite pour recharger une derniĂšre fois ma montre pour ĂȘtre sĂ»r de tenir jusqu’au bout. À peine endormi qu’elle me rĂ©veille. Je rĂąle
 Hein quoi ? DÉJÀ ? J’ai eu l’impression de fermer les yeux 3 secondes que les 45 minutes Ă©taient Ă©coulĂ©es. Une mi-temps sans dĂ©conner. Le rĂ©veil est compliqué  Patrick Papa et Laura me regardent inquiets, comme s’ils pensaient que je ne pouvais pas repartir. Je ne les remercierai jamais assez de m’avoir attendu 1h dehors sur le parking Ă  2h05. Plus les heures Ă  patienter dehors le temps que j’ mal partout, j’ai froid, j’ai l’impression d’avoir de l’acide qui me ronge les pieds. En vĂ©ritĂ© je sais trĂšs bien que j’irai au bout mĂȘme en rampant s’il le faut. Je remets mes chaussures, ma frontale, ma casquette par dessus. J’avale un doliprane, je branche mes Ă©couteurs et je repars en boitant tel un blessĂ© de Guerre. J’avance sur le bord d’une 4 voies pendant 300 mĂštres, je ne remarque mĂȘme pas que nous longeons l’ocĂ©an Indien. Nous sommes au niveau 0 ! C’est la 3Ăšme nuit consĂ©cutive dehors et sans dormir vraiment, je suis dĂ©phasĂ©. Je n’ai qu’une seule chose en tĂȘte qui va en boucle le chemin des anglais, le chemin des anglais, le chemin des chemin des anglais
 ses pavĂ©s de roche volcanique qui s’étendent sur 7 km. Je l’apprĂ©hende un petit peu, surtout dans mon Ă©tat, presque autant que le MaĂŻdo et le TaĂŻbit. J’ai passĂ© les 2 sans grosse difficultĂ©, Ă  moi de me concentrer autant pour le passer sans encombre. J’aperçois la barriĂšre qui marque le dĂ©but du chemin Ă  quelques dizaines de mĂštres, “rappelle-toi des conseils de Nathalie, pas Ă  pas dans le chemin”.Il est 2h30. En entrant sur le chemin j’ai 3 personnes Ă  ma hauteur. Je leur demande “combien de temps pour le chemin ?” Ils me rĂ©pondent, “8h jusqu’à la redoute. 3–4h sur les pavĂ©s environ”
 Outch le coup de nouveau le mode Blaise Matuidi et je pars Ă  pleine balle dans le chemin. Regain d’énergie, je veux y passer le moins de temps possible. Ça monte trĂšs trĂšs sec dans un chemin de lacets, pendant 30 minutes. On avance exclusivement sur des pavĂ©s. Il n’y en a pas un comme l’autre mais je vole dessus ! J’avance avec la prĂ©cision Martin Fourcade. Simplement Ă©clairĂ© par ma frontale je touche la cible Ă  chaque pas. Le chemin est rĂ©putĂ© trĂšs difficile est en effet on ne nous a pas menti. J’en vois beaucoup sur le bas cĂŽtĂ© enroulĂ©s dans la couverture de champs de vision pour les 2-3 prochaines heuresJe remonte de personne en personne, je double aisĂ©ment et on ne me double pas. Y compris les rĂ©unionnais que je remonte un par un Nathalie si tu me lis un jour
 ! Par endroit le chemin se montre clĂ©ment. Il y a des passages oĂč on peut facilement enchaĂźner les pavĂ©s. Mais Ă  d’autres endroits
 c’est ingĂ©rable. ArrivĂ© trĂšs haut je devine une super vue sur l’ocĂ©an mais la nuit me laissera simplement l’ moins mal au pied, le genou clac toujours mais ça fait tellement longtemps maintenant plus de 30 heures que je m’y suis presque habituĂ©. Ici encore dans les pavĂ©s on nous fait traverser des ravines. Mode escargot en descente
 Puis je repars en flĂšche dans la montĂ©e. Au bout d’1h30 dans le sentier, aprĂšs une ultime ascension. Jen profite pour Ă©teindre ma frontale une derniĂšre fois en essayant de profiter au maximum du l’heure de la grande descente en lacet. Mode pente ne blague pas et les pavĂ©s sont passĂ©s au niveau supĂ©rieur. Ce sont presque des petits rochers maintenant. C’est le boss final de ce chemin des anglais
 À tout moment la cheville part, sortie sur civiĂšre, coup de sifflet final. Je reste concentrĂ© et me fais habituellement doubler dans la pente. Je m’en fous, allez-y passez. La route que nous voyons en contrebas est celle que nous devons rejoindre. C’est bas en effet
 J’avance, pas Ă  pas, je souffre terriblement dans cette descente, mais j’avance. Jusqu’à cette fameuse barriĂšre qui viendra clĂŽturer ce maudit chemin des me semble avoir levĂ© les bras juste aprĂšs l’avoir passĂ©, comme si la course Ă©tait finie. Je me souviens d’un sentiment du devoir accompli Ă  ce moment-lĂ . Je suis sur le bord de la route Ă©clairĂ© par des lampadaires. C’en est fini de l’ascension interminable du dĂ©but de course dans le noir, terminĂ© Mafate, ses sentiers accidentĂ©s, ses pentes abruptes et ses piĂšges. Place Ă  la civilisation, les voitures qui annoncent que ce n’est plus si loin. Les bĂ©nĂ©voles nous fĂ©licitent chaleureusement et nous indiquent le chemin pour rejoindre le pointage et le ravitaillement. Nous marchons maintenant sur un vieux chemin de fer abandonnĂ© et arrivons au ravitaillement de la Grande CHALOUPE — 154,2 KM 8701 D+Depuis La Possession 7,5 km / 310 d+Temps de course 544514“Il reste combien de km Madame ?”- LĂ  vous avez encore 9 kilomĂštres d’ascension jusqu’au Colorado, les 3 premiers Ă©tant sur les pavĂ©s volcaniques et merde. Ensuite environ 4 km de descente technique et c’est terminĂ©. Moi qui croyait que c’en Ă©tait fini de ces pavĂ©s
 D’oĂč je suis on voit les frontales qui passent le col. Ça grimpe sec km et 1000 d+. 13 km qui viendront s’ajouter aux 154,2 dĂ©jĂ  parcourus et ce sera la ligne d’ est 4h45 du matin, je m’assois pour profiter de cet avant dernier ravitaillement. Le jour commence Ă  se lever, on aperçoit les premiĂšres lueurs au loin. J’ai un petit coup de barre, mais la fatigue ne prendra plus le pas sur ma volontĂ© d’aller passer la ligne d’arrivĂ©e. En parlant de ligne d’arrivĂ©e, il est obligatoire de porter le t-shirt officiel dans le stade de la Redoute. C’est gĂ©nĂ©ralement ici que les coureurs se changent. Je l’attrape dans mon sac, retire mon t-shirt technique et enfile ce magnifique t-shirt jaune et blanc. Il est tout propre et sec. Ça sent bon la lessive et la fin du Grand Raid. Mais avant ça Thibault tu dois rester concentrĂ©, il y a encore 4 heures pour y arriver. J’ai encore moyen d’aller chercher les moins de 60 me relance dans les pavĂ©s, avec mon t-shirt tout propre et frontale allumĂ©e. C’est parti pour 9 km de montĂ©e avec 800 d+,Ici, de nuit encore. Extrait de double tous les coureurs de la montĂ©e car j’ai retrouvĂ© mes jambes du dĂ©part. Comme quoi envoyer un message Ă  son cerveau que la fin de la course approche et la douleur disparaĂźt presque. Puis au terme des 3 km qui viennent clĂŽturer 10 km de pavĂ©s volcanique, le sol s’adoucie. Nous marchons sur ce qui semble ĂȘtre de l’herbe sĂšche, de la terre. Quel bonheur. Il fait complĂštement jour c’est la FIN DE LA TROISIÈME ET DERNIÈRE NUIT. Mon genou est Ă  la limite de la rupture mais je m’en fiche, j’avance trĂšs bien et je le sais maintenant je serai Finisher de la Diagonale des y a une sorte de relĂąchement gĂ©nĂ©ral des coureurs dans cette montĂ©e, beaucoup de gens se parlent, sourient, s’encouragent pour les derniers kilomĂštres. Ça monte mais sur un large chemin sans aucune difficultĂ©. Nous passons mĂȘme sur une route qui monte puis descend pendant 1 ou 2 km. Pour l’anecdote, mon sac s’est complĂštement ouvert sur cette route, je l’avais mal fermĂ© en rangeant ma batterie montons un dernier gros morceau assez raide de 3 km dans de la terre rouge boueuse en direction du Colorado. J’avale un dernier doliprane car la douleur de mon genou devient presque insupportable. J’ai le droit ça fait 4h que je suis parti de la Possession ! J’ai un peu peur pour la derniĂšre grande descente qui mĂšne Ă  Saint-Denis, mais j’irai en rampant s’il le faut. AprĂšs cette derniĂšre montĂ©e du Grand Raid, nous arrivons au ravitaillement du Colorado. Le — 164 KM 9862 D+Depuis La Possession 9,7 km / 831 d+Temps de course 574119Il est 7h41 du matin. Je n’ai pas envie de rester longtemps ici. Je n’ai qu’une hĂąte arriver au plus vite pour aller chercher la mĂ©daille. Il y a des pains au chocolat au ravito, petit dĂ©jeuner de de ils ne sortent pas du four ce sont des sachets mais ça change de la soupe aux vermicelles que l’on s’est mangĂ© pendant 3 jours. J’attrape un verre de ThĂ© que je bois presque cul sec et je file dans la descente qui s’annonce cauchemardesque dĂšs le dĂ©part. Mon genou me hurle d’arrĂȘter les frais et je lui impose une descente de l’extrĂȘme de 600 est au rendez-vous dans cette descente de la boue, des racines bien glissantes, des cailloux, des rochers. 4 km et c’est la fin. C’est le bouquet long 4 km de descente dans des conditions pareilles avec plus de 9000 d- dans les de la derniĂšre fois j’active le mode Blaise Matuidi, cette fois pas pour le cĂŽtĂ© guerrier mais pour les grands gestes des bras que je me vois effectuer Ă  chaque passage dĂ©licat. Aucune Ă©lĂ©gance ! Ça n’en finit pas. Je m’aide de mes mains pour passer les virages compliquĂ©s, et je revois tous les copains que j’ai doublĂ©s 8 km plus tĂŽt dans la montĂ©e du Colorado qui me passent devant sans aucune difficultĂ©. J’ai pris l’habitude je suis j’aperçois Saint-Denis, et j’entends mĂȘme la musique qui Ă©mane du Stade de la Redoute. Ça sent bon. Mais le ciel en dĂ©cide autrement et dans ce qui semble ĂȘtre une ultime tentative de dĂ©stabilisation, lĂąche des trombes d’eau rendant ainsi la descente boueuse et la roche glissante
 “Non je ne sortirai pas la veste si c’est ce que tu veux”. Au bout de quelques minutes le ciel capitule; rien n’y fera je serai finisher, tu ne peux plus rien pour d’en haut j’aperçois enfin le stade de la redoute. Le soleil re-pointe le bout de son pointage dans la descente et j’accĂ©lĂšre le pas dans les virages, je me remets Ă  courir et Ă  sauter pour passer les roches. J’entends “ALLEZ MON TITI !” Mon pĂšre est Ă  quelques mĂštres plus terminons tous les 2 les quelques mĂštres qui nous permettent de sortir une bonne fois pour toute de la montagne au bout d’environ 1h30 de descente.“La redoute c’est Ă  500 mĂštres”, m’annonce-t-on sur le bord du chemin. Du plat ! TerminĂ© la montĂ©e, terminĂ© la descente. Il reste 500 mĂštres et c’est la fin. Je n’ai plus AUCUNE douleur. Je cours, pas trĂšs vite mais un petit 9 km/h sans problĂšme. PlutĂŽt pas mal aprĂšs 59h d’effort. Un petit chemin tracĂ© nous emmĂšne tout droit au stade de la redoute, il y a beaucoup de monde en bas. “BRAVO THIBAULT” ! “ALLEZ THIBAULT TU L’AS FAIT”. Nombreuses sont ces petites phrases qui viennent d’inconnus et qui font et ont fait un bien fou pendant toute la course. J’accĂ©lĂšre tant bien que mon mal, mon pĂšre me suit derriĂšre en camĂ©ra embarquĂ©e
Ça va trop vite. Tout dĂ©file dans ma tĂȘte La volontĂ© de faire quelque chose de cette annĂ©e 2018, la premiĂšre sortie de la prĂ©paration par -6°C avec le nez en sang Ă  cause du froid, l’inscription Ă  l’Écotrail sur un coup de tĂȘte un soir de dĂ©cembre, puis celle Ă  la Diagonale un soir de FĂ©vrier, la premiĂšre rando-course de 42 km Ă  Meudon, la deuxiĂšme vendredi soir dans le Bois de Boulogne Ă  faire des rencontres nĂ©buleuses pendant que les copains sont au bar, les sorties dans les rues de Paris gelĂ©es par la neige, les escaliers de Montmartre de 37 m d+/d- que je montais 12 Ă  25 fois de suite pour faire entre 500 et 1000 de dĂ©nivelĂ©, la cuve sur le bas cĂŽtĂ© de l’avenue de Gravelle Ă  Vincennes, les Buttes Chaumont, le parcours de 12 km des Alpes Mancelles qui ressemble Ă  un petit dinosaure sur Strava, les 150 fois oĂč j’ai refusĂ© une biĂšre avec les copains, les 80 km de boue de l’Écotrail, le tendon qui se dĂ©chire au 40Ăšme, la hargne de finir sur les 40 autres, la convalescence pendant 5 semaines, les 81 km de Saint-MalĂŽ-du-Bois la semaine qui suit, l’arrivĂ©e sans mĂ©daille, les nombreuses sorties sous les trombes d’eau, la grosse blessure en Mai qui remet tout en cause, les examens mĂ©dicaux Ă  n’en plus finir, IRM, radio, Ă©cho, les sĂ©ance de kinĂ©, d’ultrason, d’osthĂ©o, de cryo. Les autres blessures qui s’enchaĂźnent. Les sĂ©ances avec la genouillĂšre, puis les essais sans. La viande des grisons, le blanc de boulet, le riz et le blĂ© le midi, les pĂątes, les pomme de terre le soir, les flocons d’avoine le matin. Les sorties vĂ©lo dans les routes de campagnes Sarthoises, et toutes celles chez “Keep Cool” aprĂšs le boulot. Tous les soirs entre 30 et 50 km. L’excercice “abdos difficile” de 14 minutes 3–4 fois par semaine, les heures de gainage, de proprioception sur la planche en bois ou sur la demi sphĂšre. Le week-end choc Ă  PrĂ©failles, la dĂ©chirure du mollet dans la foulĂ©e. Ne plus pouvoir courir, ne plus vouloir courir. Se remettre, et voir le deuxiĂšme genou lĂącher Ă  6 moins de semaines de la course. Compter les jours, se rassurer. Les 25 bosses de Fontainebleau, ça tient. Toutes ces sorties, toutes celles auxquelles je ne pense plus. Je repense Ă  tout ça, en quelques secondes. J’ai un sourire jusqu’aux oreilles en repensant Ă  tout ça. Tu vas le faire mon pote. Sur ma montre ça vibre, mes amis se demandent quand je vais arriver. J’arrive les amis ! J’ 21 Octobre, 9h24 J’entre dans le petit couloir qui mĂšne Ă  la redoute. C’est mon moment. Cette terre battue rouge, ce dernier virage Ă  droite et cette arche Ă  100 mĂštres je les ai vues et revues 100 fois sur les vidĂ©os. Je me suis vu dessus des milliers de fois. J’y suis. Ça va trop vite, tout est flou, il faut regarder partout. Les supporters applaudissent, le micro du speaker annonce mon arrivĂ©e. Dans le dernier virage je pousse un hurlement de rage comme pour dire “tu l’as fait bonhomme, tu es immense”. Allez profite putain !Je suis sur la derniĂšre ligne droite, les larmes me viennent. Je les ai retenues depuis plusieurs kilomĂštres mais lĂ  je n’ai plus aucune raison de les retenir. Les 2 photographes sont Ă  50 mĂštres sous leur parasol. Je lĂšve les bras Ă  la façon de Zidane aprĂšs son penalty contre l’Italie en quart de finale de la coupe du monde pĂšre est derriĂšre et semble immortaliser ce moment de dos. Et je montre ma tĂȘte avec mes 2 doigts pour montrer que je suis allĂ© le chercher loin lĂ  haut. Loin de me douter que la cĂ©lĂ©bration ressemble fortement Ă  celle de Memphis Depay
 Et merde. Faire 168 bornes pour cĂ©lĂ©brer comme un Lyonnais il fallait le faire ! Non, cette cĂ©lĂ©bration c’est la mienne, il n’a rien fait franchis la ligne d’arrivĂ©e au bout de 59 heures, 24 minutes et 28 secondes. Échec et mat. Le fou a traversĂ© sa diagonale et ne lui a laissĂ© aucune chance. Putain, c’est REDOUTE — 168,6 KM 9862 D+ → Bon j’ai 175 Ă  la montre mais c’est pas 1701Ăšme 539Ăšme sĂ©nior hommeLien strava la ligne d’arrivĂ©e, je m’écroule sur les genoux. Laura et Maman me sautant dans les bras et mon pĂšre nous rejoint dans la foulĂ©e. C’est un moment dont je me souviendrai toute ma me remet la belle mĂ©daille et le cĂ©lĂšbre t-shirt “J’AI SURVÉCU”.Je m’empresse de me libĂ©rer mon sac, ça fait 60 heures que je traine 4 kg sur les Ă©paules. J’enlĂšve mon dossard, mes chaussures, mes chaussettes, mon t-shirt
 Le soulagement extrĂȘme. J’ai un sentiment de libĂ©ration absolu. Les vĂȘtements secs que j’enfile sont sidoux et confortables. Je suis un peu dĂ©calquĂ© mais je file manger mon repas chaud offert par l’organisation. Pas de surprise, du riz, du rougail saucisse, des pĂątes et du poulet ! Un dernier ravito en soi
En me servant Ă  manger je fais une rencontre extraordinaire, celle d’Alix K/Bidi. C’est un local, il doit avoir plus de 65 ans et est d’une gentillesse le reconnais car je l’ai vu sur une vidĂ©o de RĂ©union la 1Ăšre le TF1 Français 2 semaines avant la course en train de prĂ©senter une partie de la course reportage ici K/Bidi reportage de RĂ©union la 1ĂšreC’est un personnage Alix. Il en est Ă  sa 12Ăšme participation consĂ©cutive... Quel courage. Il me fĂ©licite chaleureusement pour mon exploit. Avant de partir je lui demande “Comment tu fais pour revenir tous les ans en sachant ce qui nous attend ? - C’est la passion d’ĂȘtre en montagne. Le Grand Raid nous offre des paysages que tu ne verras nul part ailleurs, c’est ici que j’ai envie d’ se regarde longuement, on se serre chaleureusement la main et je m’en vais prendre mon repas. Mon pĂšre m’apporte une biĂšre
 AprĂšs 3 nuits blanches, tant d’effort et des semaines sans alcool je me demande bien si c’est une bonne idĂ©e. Mais merde, profite. Il est peut ĂȘtre 9h30, il doit faire 30 degrĂ©s dĂ©jĂ . Tu l’as mĂ©ritĂ©e. Je pense que c’était la meilleure biĂšre de ma table je suis Ă  cĂŽtĂ© d’un homme d’environ 35 ans. Je n’ai malheureusement ni son nom ni son dossard, mais j’ai passĂ© un super moment avec lui. Il est arrivĂ© la veille en 44h il me semble costaud, et on a passĂ© une trentaine de minute Ă  se chambrer et Ă  rire. Il vient de Grenoble et a dĂ©jĂ  fait 4 fois l’UT4M. C’est un bon le me prĂ©vient aussi de ne pas m’inquiĂ©ter, que mes pieds vont gonfler dans les prochains jours et que c’est parfaitement normal. Et il ne s’est pas trompé  Merci de m’avoir prĂ©venu car c’est assez flippant. Si tu te reconnais, n’hĂ©site pas Ă  te manifester ! Je serais ravi de refaire une course avec toi un de ces 4. Avant de quitter le stade de la redoute, je suis obligĂ© de faire un passage par les kinĂ©s et les podologues. Je dois absolument soigner les ampoules que j’ai aux Ă  Sans Souci, il n’y a pas d’attente. Mais je retrouve 1 des 2 podologues qui m’avait soignĂ© la veille. Elle se souvient bien de moi on avait beaucoup ri. Je lui fais un clin d’oeil en disant “Tu m’as pourri les pieds, j’ai souffert sur les 50 km”- Oui mais tu es arrivĂ© hein !La podologue qui s’occupe de moi semble avoir de la bouteille et n’a peur de rien. Elle retire mes chaussures. Je m’excuse par avance pour l’image qui va suivre mais je me dois de montrer Ă  quoi ressemblent des jambes et des pieds aprĂšs 168 km, 10 000 m de dĂ©nivelĂ© et 59h24 pour les parcourir. Ça fait partie du vous rassure, Ă  l’heure oĂč j’écris 10 jours aprĂšs l’arrivĂ©e mes pieds sont au max, mĂȘme si je n’ai pas encore retrouvĂ© toute la sensibilitĂ© de mes 2 gros orteils. C’est en bonne voie !Pour soigner les ampoules il n’y a pas 12 façons de faire. Scalpel, seringue, dĂ©sinfectant et on fait sĂ©cher Ă  l’air libre. Et faire des bassines de dĂ©sinfectant 2 fois par jour Ă  ce stade !Je la remercie chaudement pour son aide et enchaĂźne avec les kinĂ©s. 3 jeunes filles pour moi tout seul ! Elles sont souriantes et efficaces, mais sans le savoir, elles m’ont donnĂ© une leçon de trail. J’ai compris pourquoi les traileurs se rasaient les jambes
Vous voyez ces 2 gros strapping sur la photo ci-dessous, imaginez ce que je peux ressentir quand elles essaient de les arracher sachant qu’ils font 15 fois le tour de la jambe ? Je littĂ©ralement hurlĂ© sous la tente des kinĂ©s. Ça les fait beaucoup rire. “Ah bah tu vois ce qu’on ressent tous les mois quand on s’épile nous ?”. - Non lĂ  c’est la peau que vous arrachez ! La podologue qui m’a soignĂ© arrive tout doucement avec son petit tube d’éther et dit “Vous voulez pas dĂ©coller avec ça ?” - SI SI SI SI MOI JE VEUX !Oui l’éther permet de retirer un pansement ou un bandage sans douleur. Elle l’a fait pour retirer le bandage de mes pieds. Elle arrive un peu tard mais ça m’épargnera quelques poils restants sur ma cuisse. Heureusement j’ai le luxe de me faire masser les 2 jambes qui sont plutĂŽt en bon Ă©tat Ă  part les bandelettes sur le cĂŽtĂ© des cuisses qui sifflent. Je suis d’ailleurs Ă©tonnĂ© de mon Ă©tat musculaire qui est excellent. Surtout aprĂšs les problĂšmes rencontrĂ©s pendant la prĂ©paration notamment aux mollets. Les heures de renforcement et de vĂ©lo n’ont pas Ă©tĂ© faites en comptais refaire un strapping pour la tendinite mais l’épisode dĂ©pilatoire m’en a dissuadĂ©. Nous repartons du stade, je le regarde comme si c’était la derniĂšre Grand Raid touche Ă  sa fin, il est l’heure d’aller jours plus tard
Si je devais rĂ©sumer la course, TOUT est compliquĂ©, Ă  chaque seconde. C’est un enchainement de piĂšges, une course sur mesure conçue pour briser les Ă©gos et les corps. Champion du monde ou pas, quiconque se prĂ©sente sur la ligne de dĂ©part n’a aucune garantie de la finir. Comme le dit si bien François D’HaĂšne 4 victoires au GR Ă  chaque participation “chaque annĂ©e, on ne sait pas Ă  quelle sauce on va ĂȘtre mangĂ© ”, ce qui reflĂšte bien l’humilitĂ© qu’il faut dans ce Guillon et Nathalie Mauclair, les 2 champions qui m’avaient donnĂ© des conseils avant la course ont tous les 2 vĂ©cu une course difficile. Antoine a chutĂ© Ă  Marla ce qui l’a handicapĂ© pour tout le reste de la course mais termine tout de mĂȘme Ă  une trĂšs belle 4Ăšme place ! Bravo Ă  lui. Nathalie qui a remportĂ© l’épreuve Ă  2 reprises a Ă©tĂ© contrainte d’abandonner au dĂ©but du Sentir du TaĂŻbit Ă  cause de douleurs 2 m’ont envoyĂ© un message pour me fĂ©liciter. Ça fait chaud au n’y a que dans ce sport que les champions du monde gardent les pieds sur terre et sont aussi accessibles.—Cela fait presque 2 semaines que l’aventure s’est achevĂ©e et j’ai beaucoup de mal Ă  redescendre sur terre. Je n’arrive pas encore Ă  rĂ©aliser. Il y a trop d’informations, trop de difficultĂ©s, trop de pensĂ©es, trop d’images, de moments forts, de kilomĂštres, pour que le cerveau puisse digĂ©rer tout cela et en faire un film digeste. Le disque dur sature naturellement. Beaucoup attendaient mon retour pour que je leur raconte ce que j’avais traversĂ©, mais force est de constater que c’est impossible. Il est impossible de rĂ©sumer autant de temps en quelques minutes. Donc j’ai essayĂ© de l’écrire, pour moi, et pour ceux qui m’ont suivi avec intĂ©rĂȘt. MĂȘme si le seul et unique moyen pour comprendre ce que j’ai traversĂ©, c’est de le vivre et un rĂ©flexe que beaucoup ont, c’est d’avoir tendance Ă  s’arrĂȘter sur la course en elle-mĂȘme. “Tu as couru 59h ! C’est ouf”. Oui, 59h et 3 nuits, c’est le temps qui passe entre le moment oĂč vous partez du bureau le vendredi soir, et le moment oĂč vous vous rĂ©veillez le lundi matin. Mais en rĂ©alitĂ© il faut remonter bien plus loin. Les 59 heures sont l’aboutissement de jours, de semaines et de mois d’entraĂźnements intensifs avec tous les Ă©tats psychologiques qui vont avec. Je ne sais pas quel est le seuil de prĂ©paration et de sacrifices nĂ©cessaire pouvoir prĂ©tendre Ă  finir cette Ă©preuve, ni jusqu’oĂč les heures passĂ©es Ă  courir dehors, Ă  faire du vĂ©lo, du renforcement musculaire, Ă  manger sainement, Ă  ne pas boire, sont payantes. Ce n’est malheureusement pas quantifiable, mais il faut le faire pour mettre toutes les chances de son cĂŽtĂ© puisque mĂȘme ĂȘtre prĂȘt Ă  1000% n’est pas une garantie pour terminer. Il faut en plus faire la course parfaite. Je me souviens avoir chutĂ© une fois, je ne sais plus oĂč ni comment, juste m’ĂȘtre rattrapĂ© de justesse. Mes chevilles sont parties en vrille au moins une centaine de fois, peut-ĂȘtre 200 ou 300 mĂȘme. Bref, tout ça pour dire que j’aurais pu ĂȘtre arrĂȘtĂ© n’importe qu’on se dise les choses comme elles le sont, j’ai Ă©tĂ© un kamikaze de m’inscrire Ă  cette Ă©preuve en n’ayant ni les points pour la faire, ni mĂȘme la connaissance de ce qu’était un trail. Juste avec un simple petit marathon dans les jambes 1 an et demi auparavant
 J’en suis pleinement conscient. Je ne recommande cela Ă  personne car quelque part, on force le cours des choses et on brusque son corps et sa tĂȘte. On se met un peu en danger aussi. Moi je l’ai fait car je ne doutais pas de moi. J’avais conscience de mes aptitudes physiques et mentales, Ă  entreprendre quelque chose et l’amener au maximum. Heureusement que les 2 courses de 80 km qualificatives que j’ai faites en 6 semaines se sont bien passĂ©es car je me serais retrouvĂ© avec un billet pour la RĂ©union et un dossard que je n’aurais pas pu porter. J’aurais eu l’air vrai piĂšge Ă  Ă©viter est de banaliser cette Ă©preuve. Elle est loin d’ĂȘtre accessible par tout le monde et je le dis en toute humilitĂ© et surtout en connaissance de cause maintenant. Elle n’est pas la plus dure du monde par hasard sur ce format. Mais si toutefois vous vous sentez d’y aller, que vous avez les ressources physiques, mentales, et la dose d’inconscience qu’il faut, allez-y les yeux fermĂ©s car c’est la plus belle chose que vous vous raconterez maintenant ?Pendant tout la prĂ©paration, je voyais cette Ă©preuve une fin en soi; comme ma retraite d’une carriĂšre aussi courte qu’intense dans ce sport. Partir tout en haut, comme Deschamps. Juste avant la course, j’aurais presque jurĂ© de m’arrĂȘter aprĂšs. Je pensais que je serai dĂ©goĂ»tĂ© aprĂšs l’épreuve, mais Ă©trangement je ne le suis pas du tout. Comme me l’a si bien dit Alexandre Boucheix Casquette verte c’est sĂ»rement que j’ai rĂ©ussi ma course et mon aprĂšs course. Lui aussi aura Ă©tĂ© prĂ©cieux dans les conseils de une des choses que je me suis rĂ©pĂ©tĂ©e de nombreuses fois pendant la course c’est “va au bout car vu le massacre, c’est hors de question que tu remettes les pieds ici”. Et finalement, je pense que j’y reviendrai un jour. Pas l’annĂ©e prochaine, peut-ĂȘtre pas celle d’aprĂšs, mais plus tard. Plus vieux peut-ĂȘtre. C’est encourageant de constater que l’on a encore des ressources malgrĂ© une telle Ă©preuve. On se sent vivant, en forme, bien dans sa tĂȘte et son aussi envie d’en faire d’autres, des diffĂ©rentes et j’en ai quelques unes en tĂȘte que je garde pour moi pour le moment. Pas forcĂ©ment aussi dure il n’y en a plus beaucoup de toute façon, mais d’autres formats, d’autres terrains. Je sais que j’ai une belle marge de progression. J’ai pris une grosse leçon en descente. On parle toujours de la difficultĂ© de la montĂ©e mais la descente est bien pire. Prendre 10 000 mĂštres de dĂ©nivelĂ© nĂ©gatif en si peu de temps
 c’est si ça se trouve je vais ranger les chaussures et me mettre au golf. Ça plairait bien Ă  ma mĂšre ça
 Ou peut-ĂȘtre continuer ET jouer au golf. Je vais reposer ma tĂȘte et mes jambes, et me laisser le temps pour bientĂŽt pour de nouvelles Ă  mes parents, Ă  Laura, Ă  Patrick pour leur patience, leur assistance en or, les km parcourus pour rejoindre certains points de passage et leur soutien. Merci Ă  tous ceux qui me suivent depuis le premier jour, mes amis. Merci Ă  ceux qui m’ont Ă©crit avant, pendant et aprĂšs la vous avez aimĂ© cette histoire n’hĂ©sitez pas Ă  dĂ©couvrir ma derniĂšre course en Arabie Saoudite, en vidĂ©o ici et Ă  vous abonner Ă  la chaĂźne.

camera sportive edition 14 by matuidi avis